Le cinéaste Louis Bélanger nous propose une vision différente de l'adolescence au cinéma. Dans Vivre à 100 milles à l'heure, il n'y a pas de beuveries, pas d'hormones dans le tapis ni de désir oppressant d'entrer dans le moule. Le film autobiographique s'intéresse plutôt à de jeunes hommes cherchant à grandir trop vite, à obtenir l'autonomie et l'affranchissement que procure la vie d'adulte. Pour y arriver, ils se mettront à vendre de la drogue, à l'école, puis dans les rues. Un choix qui leur créera bien des ennuis.
Le film se déroule à la fin des années 70 jusqu'au milieu des années 80, une période qui nous rappelle l'oeuvre phare du réalisateur; Gaz Bar Blues. La reconstitution historique est intéressante. Tourné dans la ville de Québec, le long métrage replongera certainement les cinéphiles ayant vécu cette époque dans leurs propres souvenirs.
À plusieurs moments, les images nous rappellent celles de Ricardo Trogi dans 1981. Évidemment, le propos et le genre sont très différents, mais quelques éléments - protagoniste masculin adolescent, narration en voix hors champ, époque, etc. - nous permettent de faire naturellement des liens entre les deux productions québécoises. On en vient même à se dire que Vivre à 100 milles à l'heure aurait pu être le portrait de Ricardo si celui-ci avait opté pour un chemin plus dangereux. Le nouveau film de Louis Bélanger nous a aussi fait penser à C'est pas moi, je le jure!, comédie dramatique de Philippe Falardeau mettant en vedette un très jeune Antoine L'Écuyer.
La distribution très jeune de Vivre à 100 milles à l'heure relève le défi avec panache. Bien qu'elle soit composée essentiellement de personnages masculins, les quelques actrices féminines - Cassandra Latreille, Sandrine Poirier-Allard - se démarquent grâce à un jeu sincère et habité. Rémi Goulet et Antoine L'Écuyer forment, de leur côté, un duo efficace, voire touchant. Malheureusement, le fait qu'il y ait onze acteurs pour interpréter quatre personnages (enfance, adolescence, âge adulte) engendre une certaine confusion chez le spectateur et nuit à la cohérence globale de l'oeuvre.
Le film, malgré ses qualités techniques et esthétiques, manque de vigueur au niveau du scénario. Malgré ses quelques rebondissements, l'ensemble reste plutôt neutre, gris, comme les murs de la prison Orsainville, toile de fond de certaines scènes clé. On aurait aimé être davantage ébranlé par les situations dramatiques vécues par le protagoniste et enchantées par sa rédemption, mais le tout nous laisse de glace.
Vivre à 100 milles à l'heure ne marquera pas l'histoire du cinéma au Québec, mais reste tout de même une proposition différente et honnête du classique film pour adolescents. Un drame, souvent lourd, qu'on aurait aimé plus engageant.