Les Jeux olympiques de 1972, qui se tenaient à Munich, avaient une signification pour le moins particulière allant bien au-delà des compétitions sportives. Se déroulant en sol allemand à peine 27 ans après la fin de la Deuxième Guerre mondiale, l'événement était marqué d'un inévitable caractère sociopolitique de par la participation de plusieurs athlètes israéliens, et par conséquent d'une volonté clairement exprimée de laisser les horreurs du passé derrière pour contempler un avenir plus paisible et radieux.
Bref, nul besoin de souligner à quel point la réussite de ces Jeux était essentielle pour le pays hôte.
Malheureusement, l'un des pires scénarios imaginables s'est produit lorsque la délégation israélienne fut prise en otage par le groupe terroriste palestinien Septembre noir.
Il y a vingt ans, Steven Spielberg avait abordé la tragédie sous l'angle des représailles avec son long métrage tout simplement intitulé Munich.
Avec September 5, le cinéaste suisse Tim Fehlbaum relate les tristes événements du point de vue de l'équipe de journalistes du réseau américain ABC, qui s'est retrouvée aux premières loges pour tenir le reste de la planète informé des développements de la crise en cours. Des premiers coups de feu ayant résonné à l'intérieur du village olympique, jusqu'à la fin tant redoutée de cette longue et chaotique journée sur le tarmac d'un aéroport local.
Avant toute chose, September 5 est un puissant thriller journalistique nous présentant de manière aussi prenante que pertinente tout ce qu'implique et impliquait la profession à cette époque révolue.
Du journalisme de terrain à la confirmation de faits, en passant par la mise en ondes et la synchronisation de tous les aspects de la diffusion, le long métrage de Tim Fehlbaum s'impose de par le rythme soutenu et la tension palpable qu'il parvient à créer à partir de cette simple immersion au coeur d'un univers professionnel aussi complexe et anxiogène que fascinant.
Dans la peau de la personne attitrée à la direction de la régie au moment des faits, John Magaro mène une solide distribution amenant toute l'énergie et la nervosité voulues à l'ensemble. D'autant plus que l'équipe télé que nous sommes appelés à suivre ici n'a pas l'habitude de couvrir ce type de nouvelles, permettant au cinéaste, d'une certaine façon, de placer son public sur un pied d'égalité avec ses protagonistes.
Entre les reporters ayant su s'introduire à temps au coeur du village olympique pour en ramener les images inédites et glaçantes des ravisseurs, l'attention du public passant graduellement des compétitions toujours en cours au drame qu'on ne pouvait alors plus passer sous silence, Fehlbaum aborde et développe son principal sujet depuis le huis clos parfaitement édifié autour du studio par l'arrivée au compte-gouttes des plus récents développements.
Mais là où September 5 révèle réellement toute sa pertinence, c'est dans son dernier acte. Plus précisément, au moment où une erreur journalistique est commise, quelques minutes avant que la planète entière prenne connaissance de la conclusion tragique de cette longue et bouleversante journée de la fin de l'été 1972.
À travers la culpabilité du responsable, mais également du post-mortem de cette couverture aussi insensée qu'improbable, le film prend fin en accueillant tout simplement les premières heures du 6 septembre, et les nouvelles nouvelles qui retiendront l'attention.
En nous plaçant à une telle distance de l'action, Fehlbaum remporte haut la main son pari de nous faire ressentir l'impuissance, le stress et l'incompréhension de ses personnages, tout en soulignant toute l'ingéniosité et la débrouillardise qu'ils ont su déployer pour accomplir le mandat qu'ils s'étaient eux-mêmes confiés.
Dans le grand schéma de la vie, l'erreur commise en régie citée ci-haut demeure bien moins catastrophique que tout ce qui s'est produit à proximité. Mais il s'agit néanmoins d'un faux pas pesant sur la conscience du principal intéressé, qui doit rapidement retrousser ses manches et retrouver son sang-froid afin de poursuivre tout ce qu'il avait su accomplir sous pression auparavant.
Réalisé avec une admirable économie de moyens, et surtout autant de perspicacité qu'un indéniable savoir-faire technique et narratif, September 5 est bien plus qu'un petit film sur un grand sujet, nous rappelant habilement que la force et l'impact d'un récit reposent en grande partie sur la manière dont il nous est raconté.