Il y a de plus en plus de films québécois dits « indépendants », c'est-à-dire qui sont réalisés sans l'appui des institutions et même souvent sans distributeur, mais peu d'entre eux sont des films d'action. Transit n'en est pas vraiment un non plus, remarquez, car il est souvent involontairement plus drôle que les meilleures comédies. Quoi qu'il en soit, le film de Christian de la Cortina a été récupéré par un distributeur important (Les Films Séville), qui a décidé de le lancer à travers le Québec. Ce n'est vraiment pas un service à lui rendre.
Un enquêteur de la police de Montréal, Jean-Pierre, interfère avec le travail d'un agent double de la GRC qui a infiltré un réseau de vols de voiture opéré par la mafia. Une autre agente va donc tenter de contrôler le policier, pendant que ce dernier apprend qu'il est atteint d'un cancer de la prostate avancé et qu'il refuse de partager le mérite de son travail acharné, alors qu'on attend d'un jour à l'autre le paiement d'une grosse somme.
Un personnage principal à qui il arrive tout (cancer, mauvaise journée au boulot, cherche à retrouver sa fille, avait une aventure avec la secrétaire, il s'évanouit même au mauvais moment!), ce n'est jamais sérieux. Une erreur de débutant qui aurait pourtant pu être facilement évitée, d'autant que le film, du moins visuellement, n'est pas moins bien nanti qu'un autre. Sauf que le montage, déjà handicapé par le déroulement bancal du scénario, est bourré d'artifices inutiles et d'une musique envahissante et cheap.
De nombreuses coïncidences forcées passent rapidement pour des invraisemblances et quand le film trouve enfin le bon ton, le mal est déjà fait. Plus rien ne tient, il n'y a rien de sérieux dans les décisions et les risques que prennent les personnages. Ou alors c'est que les comédiens, prisonniers de dialogues peu convaincants, jouent sur plusieurs registres en même temps... Ils manquent régulièrement de naturel, rendant simplement les émotions de base comme le feraient des étudiants du secondaire. Pas facile de faire autrement avec leurs personnages, qui sont des imbéciles qui prennent des risques inconsidérés et qui mettent tout le monde en danger. Les clichés sont nombreux et les dialogues sont bourrés de lieux communs.
Le film n'assume pas non plus sa maturité; on bat les traîtres hors du cadre, derrière des voitures pour qu'on le voit pas, et on garde sa brassière pour faire l'amour. On comprend toutes les considérations humaines derrière ça, mais dans un film sérieux, ça ne passe tout simplement pas. Des scènes d'examen de la prostate et un montage alterné de sexe et d'intérieur d'avion sont assez, disons... incongrus - pour être poli - et le déroulement de l'histoire, inutilement complexe, n'est jamais tellement palpitant. Ah! Et si on doit donner un Jutra pour la meilleure réplique de l'année, il devrait aller à Julie du Page et son inimitable « Voyons, lâche ma crème, c'est quoi ça? ».
Transit est un intéressant travail d'exploration, qui est raté parce qu'il a voulu s'intégrer dans un modèle cinématographique auquel il n'appartient pas. Ce cinéma québécois réalisé sans l'appui des institutions est possiblement plus libre de contraintes et peut, si le travail est bien mené, être plus « artistique » que certains films aux ambitions uniquement commerciales. On s'en réjouit rapidement, mais on oublie aussi vite que les scénarios, refusés et commentés par les institutions, atteignent ainsi leur plein potentiel ou ne sont jamais réalisés, pour leur grand bien. Transit n'en a pas bénéficié, c'est l'évidence.
On oublie vite que les scénarios, refusés et commentés par les institutions, atteignent ainsi leur plein potentiel ou ne sont jamais réalisés, pour leur grand bien. Transit n'en a pas bénéficié, c'est l'évidence.
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