Il y a de ces « petits » films magiques. Des longs métrages américains que l'on sous-estime - ou est-ce simplement s'en désintéresse trop rapidement? - qui nous transportent dans leur univers d'une manière particulière de sorte qu'on en demande davantage, jusqu'à entretenir de la déception lorsque défile le générique de fin. Promised Land n'est pas l'un des ces films visuellement incroyables qui nous obnubilent dès les prémisses, ni une oeuvre excitante qui nous maintient sur le bout de notre siège jusqu'à une conclusion renversante, mais c'est une histoire bien ficelée et d'actualité, des acteurs compétents ainsi qu'une réalisation qui nourrit efficacement un récit bien écrit et intelligent. Un long métrage qu'on peut aisément comparer à Good Will Hunting, pas uniquement pour ses artisans similaires (même réalisateur, même scénariste, Matt Damon), mais aussi pour la qualité de son récit dramatique, son rythme et ses valeurs analogues.
Promised Land parle de l'exploitation des sols par des compagnies milliardaires qui ne craignent guère les répercussions à long terme de leur appareillage sur la flore, la faune et les hommes qui vivent au-dessus. Un sujet, évidemment, contemporain et assez inédit au cinéma. Il n'y a pas de véritables méchants dans Promised Land. Les gens qui travaillent pour les riches entreprises minières le font pour gagner leur pain et les fermiers pauvres qui hésitent à confier leur avenir à des industriels se battent pour leurs biens et leurs valeurs. Dans le monde du cinéma américain, en général, on en vient toujours à classer les personnages en deux catégories; les bons et les méchants, c'est donc toujours très réconfortant de voir un film qui semble réfléchir avant de poser un jugement.
Alors que son ami de longue date Ben Affleck semble avoir trouvé sa place derrière la caméra, Matt Damon - qui a fait, tout de même, moins de mauvais choix que son copain en sélectionnant ses rôles à l'écran - nous démontre lui aussi une autre facette de son talent grâce à son travail de scénariste sur ce film. Parce que les textes sont effectivement l'une des principales qualités de Promised Land. Évidemment, comme il incarne le protagoniste de l'oeuvre, ses aptitudes de comédien sont aussi mises à l'épreuve et confirmées. Il livre une émouvante performance, tout comme Frances McDormand et John Krasinski, qui sont tous deux fort convaincants dans les rôles de la vendeuse et de l'environnementaliste frustré par les procédures insidieuses de l'entreprise de gaz naturel.
Gus Van Sant, d'ailleurs derrière quelques grands « petits » films comme Elephant et Restless, confirme ses qualités de réalisateur humaniste avec Promised Land. Ses plans serrés et révélateurs, ses angles parfois volontairement imparfaits et la fluidité de sa caméra permettent au spectateur de d'abord croire en l'histoire qui lui est racontée et ensuite, en l'honnêteté des sentiments qui y sont véhiculés. Promised Land est, en plus d'être un divertissement intelligent, un film utile et profond qui n'essaie de ressembler à rien ni à personne et qui s'assume en tant que drame social et humain d'admirable façon.