******** Le film Prey est disponible sur Disney+ dès maintenant. **********
À l'instar du Xénomorphe de la saga Alien, cela fait maintenant plus de trente ans que la Fox ne semble pas trop savoir quoi faire de son autre monstre venu d'une autre planète ayant une passion sans égale pour la chasse et les démembrements en tous genres.
Depuis le brillant mélange de science-fiction, d'horreur et de film de guerre que nous avait proposé John McTiernan en 1987, nous avons eu droit à une série de suites et de projets dérivés ne cherchant qu'à capitaliser avec le strict minimum de conviction et d'imagination sur quelques éléments clés du long métrage original.
En ce sens, ce Prey du cinéaste Dan Trachtenberg (qui nous avait offert l'efficace suspense claustrophobique 10 Cloverfield Lane en 2016), est définitivement le meilleur film que nous ait offert la franchise en plus de trois décennies.
Prey se déroule en 1719 - ceux qui ont vu Predator 2 comprendront pourquoi. Nous suivons une jeune autochtone de la nation comanche qui souhaite par-dessus tout prouver qu'elle est aussi apte que ses confrères masculins à prendre part aux activités de chasse de sa tribu.
Si la faune nord-américaine renferme déjà son lot d'animaux peu commodes, ceux-ci semblent subitement beaucoup moins menaçants lorsqu'une créature « inconnue » bénéficiant d'une force surhumaine, d'une capacité de guérison inexplicable, et d'un arsenal avec lequel les habitants de la planète bleue ne peuvent pas rivaliser, débarque subitement dans cet région sauvage pour faire ce qu'elle fait de mieux.
Le film illustre d'ailleurs constamment ces rapports de force entre dominants et dominés - le prédateur de l'un devenant la proie de l'autre -, et ce, tant au niveau du règne animal que de l'espèce humaine. Une idée qui est également soutenue par la différence notable entre la manière posée, débrouillarde et respectueuse dont les Comanches composent avec la nature sauvage et font face à ces dangers, et celle beaucoup plus chaotique et barbare des membres d'une colonie française dont l'accent mérite d'être entendu.
Faisant désormais partie des satellites de l'empire Disney, la question était avant tout de savoir comment la Fox allait communiquer ces intentions de présenter ses respects aux nations autochtones, tout en substituant les débordements de testostérone du premier film par un récit résolument féministe.
L'idéologie serait-elle au service de l'histoire, ou serait-ce l'inverse? La bonne nouvelle, c'est que nous n'avons pas affaire ici à une production ne se contenant que de cocher les cases les plus susceptibles de lui faire obtenir le sceau d'approbation de la twittosphère la semaine de sa sortie.
Nous sommes aussi à des lieux d'un scénario comme celui du ridicule Mulan de 2020. Le personnage de Naru (incarné avec bienveillance et aplomb par Amber Midthunder) bénéficie d'un arc dramatique suffisamment bien développé pour nous faire croire qu'elle puisse tenir tête en bout de ligne à une bestiole qui en avait même fait baver ce pauvre Arnold.
Autre surprise : le haut niveau de violence qu'atteignent certaines séquences dans lesquelles le sang gicle, les os craquent et les organes ne restent jamais en place bien longtemps.
Ceci étant dit, si la mise en scène de Dan Trachtenberg se révèle particulièrement méthodique et articulée dans sa façon de dépeindre les environnements, on ne peut malheureusement pas en dire autant pour ce qui est de son approche de cette violence, qui n'atteint jamais le niveau viscéral du chef-d'oeuvre de John McTiernan.
En plus des scènes d'action brutales, le réalisateur de Die Hard passait une bonne partie du temps à filmer le vent soufflant sur les arbres, et ses mercenaires à bout de ressources observer la nature en ayant cette étrange impression d'être épiés. Et c'est cette patience - parfois déficiente dans le présent effort - qui contribuait grandement à nous imprégner de ce sentiment de menace constant.
Plusieurs décisions, autant au niveau de la réalisation que du montage ou du support musical, nous amènent également à nous questionner sur le genre de film que Trachtenberg et son équipe désiraient réellement nous présenter.
Mais ces failles ne sont pas tant liées au travail de Trachtenberg derrière la caméra qu'au fait que ce dernier a surtout pour tâche d'injecter un peu de sang neuf à une formule éculée, et de tenter de surprendre avec une créature qui n'a plus aucun secret pour les cinéphiles. Et à cet égard, la mission est en partie accomplie.
Prey se révèle en somme un divertissement compétent dans la plupart des aspects de sa production. Même si on finit par faire miroiter l'idée d'une inévitable suite, le scénario de Patrick Aison a le mérite de raconter une histoire complète, de ne pas couper les coins trop ronds, et d'arriver à une conclusion digne de ce nom. C'est toujours ça de pris!