La comédie romantique n'est pas un genre « national », c'est un genre international. Les Américains en font (des tonnes, bonnes et moins bonnes, vulgaires et moins vulgaires), les Français aussi en font, et bien sûr les Québécois. Presque toutes les cinématographiques nationales matures font des comédies romantiques. Elles finissent toujours bien (ça on aime ça) et elles sont toujours rassurantes, presque prévisibles. Mais elles peuvent aussi être rafraîchissantes et dynamiques, pour peu qu'on s'y applique. C'est le cas avec L'arnacoeur, une délicieuse petite comédie française pleine d'énergie.
Alex a un métier bien spécial : il est briseur de couple professionnel. Particulièrement talentueux, il n'a jamais échoué, mais il ne s'attaque pas aux couples heureux. Il travaille avec sa soeur et son mari, qui l'aident à amasser les informations nécessaires à sa transformation. Il manipule ses victimes pour les faire quitter leur conjoint. Aux prises avec de lourdes dettes, il n'a pas le choix d'accepter une assignation qui semble impossible : briser la relation de Juliette Van Der Becq, fille d'un riche mafieux et heureuse en ménage, et de Jonathan Alcott, qui vont se marier dans dix jours. La tâche est déjà assez ardue comme ça, et Alex qui est en train de tomber amoureux...
Cette comédie romantique toute simple fonctionne particulièrement bien sur le plan comique. Plusieurs gags sont rafraîchissants, la plupart font mouche et on s'amuse grandement à voir l'inventivité avec laquelle Alex accomplit sa mission. Les revirements sont nombreux et imprévisibles (sauf la fin...); c'était nécessaire pour ne pas qu'on puisse prévoir chaque petit gag. Cependant, la partie romantique s'avère parfois plus laborieuse parce que bien plus prévisible, mais l'amour naissant est filmé avec compétence et bien moins appuyé que dans un film hollywoodien typique. On ne réinvente pas la roue, mais on le fait avec talent, surtout dans les enchaînements et le montage, particulièrement bien rythmé.
Dommage que Romain Duris vole littéralement la vedette à Vanessa Paradis. Plus charismatique, plus enjoué, il brille dans toutes les scènes alors que sa co-vedette peine parfois à suivre le rythme. Cela nuit à quelques moments à leur complicité et à leur chimie, mais le film n'en souffre pas trop parce que le film ne s'y consacre pas exclusivement. L'amour, c'est la conclusion, le dénouement, pas le chemin. Ce sont véritablement les performances des acteurs secondaires (Julie Ferrier, François Damiens et Helena Noguerra) qui permettent au film de maintenir ce niveau élevé de qualité lors de quelques moments plus faibles de flottement narratif.
L'arnacoeur est donc un film à la fois séduisant et drôle, juste assez audacieux et suffisamment rassurant pour satisfaire tout le monde. C'est une comédie romantique française aux accents hollywoodiens, avec des acteurs compétents, un scénario sérieux (c'est-à-dire qui prend sa tâche au sérieux, qui refuse les raccourcis évidents) et un charme tout à fait légitime. La simplicité sans la bêtise, c'est rare et il faut en profiter.