L'échec était prévisible. Après le premier visionnement de la bande-annonce, on pouvait déjà entrevoir les 130 millions $ très mal investis. Mais, R.I.P.D. n'est pas fondamentalement mauvais, il n'est tout simplement pas exploité de la bonne façon. Ses prémisses auraient effectivement pu engendrer un film intéressant pour les amateurs de science-fiction et d'action; une filiale de police dans l'au-delà qui protège l'humanité des morts-vivants et les empêche de faire du tort sur la Terre, mais l'histoire globale est trop composite pour être développée en seulement 96 minutes.
Le policier Nick, joué par Ryan Reynolds, doit accepter la trahison de son confrère, sa mort, le fait qu'il laisse sa femme tant aimée dans le deuil, l'existence d'une agence spéciale dans l'au-delà qui s'occupe des morts-vivants (des êtres à l'apparence monstrueuse), sa nouvelle identité, son nouveau partenaire excentrique et chacune des règles qui entourent sa nouvelle fonction de «policier funèbre», et tout ça en moins de 30 minutes. Le personnage endosse beaucoup trop rapidement l'invraisemblable, tellement que le spectateur ne peut qu'être dérangé par cette abnégation presque instinctive. Même la relation haineuse qu'il entretient avec son coéquipier est plutôt loufoque. Le film ne prend pas le temps d'établir l'origine des rapports entre les deux protagonistes ce qui nous donne un duo peu crédible et abracadabrant.
L'intrigue aussi est très mal construite. Cette notion de portail entre les morts et les vivants qui peut être inversé grâce à une sculpture en or est très mal expliquée. Comme tout le reste, on nous lance au visage une explication succincte de sa fonction et des dégâts qu'elle pourrait causer sans nous laisser le temps de les assimiler. R.I.P.D. aurait probablement fait une série télévisée bien intéressante, mais un seul long métrage n'est visiblement pas suffisant pour démêler chacun des filons de la narration. R.I.P.D. est trop lourd pour ce qu'il prétend être.
Le travail de Robert Schwentke s'avère tout de même méritoire. Sa caméra est très dynamique. Elle prend souvent des tournants auxquels on ne s'attendait pas et nous livre des plans fort intéressants, surtout dans le contexte surnaturel et impétueux du film. Les maquillages des différents monstres et la tonne d'effets spéciaux parviennent, à certains moments, à nous faire oublier la promptitude de l'histoire. Le fait que la comédie fantastique est issue d'une bande dessinée est perceptible à l'écran, notamment dans la façon dont le réalisateur traite le sujet.
On sourit à quelques reprises dans R.I.P.D., mais nous sommes quand même bien loin d'un style d'humour subtil. Au moins une dizaine de blagues concernent le fait que dans le monde réel Reynolds a le physique d'un vieux Chinois et Jeff Bridges, celui d'une grande blonde voluptueuse. On utilise parfois le burlesque pour faire rire, parfois les jeux de mots, parfois les situations; l'aspect humoristique est très inégal... comme la construction de l'histoire et le jeu des acteurs. R.I.P.D. avait un certain potentiel, oui, mais pas au cinéma, ou du moins, pas pour un film d'une heure trente imaginé comme un blockbuster estival.