Ce n'est pas parce que Luc Besson nous a donné par le passé des oeuvres marquantes telles que Taxi et Le cinquième élément que tout ce qu'il touche se transforme en or, et l'exemple le plus récent de cette évidence - que nous avons pourtant tendance à oublier - est l'incohérent et ubuesque Les aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec. On ressent dans les images de Besson une tentative d'ironisation, de caricature du style fantastique, mais ses efforts semblent toujours freinés par un manque d'audace et d'homogénéité. S'assumer dans la parodie ou dans le sérieux d'un long métrage de fiction fantastique aurait peut-être amélioré la qualité de cette histoire, quoiqu'en somme plutôt insignifiante.
Adèle Blanc-Sec est une journaliste reconnue qui voyage à travers le monde pour percer ses secrets. Elle apprend un jour que le médecin personnel d'un pharaon aurait peut-être les pouvoirs nécessaires pour redonner la vie à sa jeune soeur, décédée par sa faute il y a plusieurs années. Elle se rend donc en Égypte et vole la momie de ce prétendu docteur. De retour à Paris, elle aide son vieil ami scientifique à s'évader de prison, où il a été enfermé pour avoir fait éclore un oeuf de ptérodactyle, pour qu'il réveille la momie de son sommeil éternel. Les choses se compliquent davantage lorsque le cadavre emmailloté se dit ingénieur et non guérisseur.
Ceux qui ont comparé Les aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec à un film d'Indiana Jones n'ont certes pas l'analogie facile puisque ces deux histoires, bien qu'elles mettent toutes deux en scène d'intrépides héros et des créatures chimériques, ne s'apparentent que très peu. Le long métrage de Besson, qui se déroule au début du siècle, plonge très souvent dans la dérision et les vaines facéties - certes, un ptérodactyle devait faire de gros excréments, mais est-on vraiment obligé de nous montrer ces derniers dégoulinant sur le visage d'un homme? Est-ce supposé faire rire?
Alors que le dinosaure volant est tout de même relativement bien exécuté, la plupart des effets spéciaux s'avèrent limités et même médiocres par moments - il faut voir l'héroïne chevaucher le ptérodactyle pour couronner les habilités techniques des Américains en matière d'effets spéciaux. Alors que le récit débute avec le soutien d'un narrateur extra-diégétique, on l'abandonne rapidement pour laisser la protagoniste nous diriger dans ce monde qui s'apparente au nôtre, mais en beaucoup plus loufoque, trop pour qu'on s'y attache. Même si la narration externe peut parfois alourdir l'histoire et entraver l'évolution des personnages au sein de la fiction, elle aurait possiblement, dans le cas présent, apporté une certaine cohérence au récit global - tout en appuyant l'aspect sarcastique - et ainsi assurer un support bienvenu au spectateur, qui a tendance à se perdre dans l'illogisme - parfois volontaire - de l'oeuvre.
Louise Bourgoin livre pourtant une performance respectable dans le rôle de cette femme téméraire, bien en avance sur son temps. Les personnages secondaires, principalement celui de Justin de Saint-Hubert (le « supposé » méchant), sont par contre risibles et empotés. Seule Adèle semble avoir un tant soit peu d'intelligence - et même là, préserver le cadavre de sa jumelle pendant des années en prétendant qu'elle n'est que malade, c'est davantage qu'une folie passagère.
Même Luc Besson a droit à l'erreur, et on lui pardonnerait ses écarts de conduite sur-le-champ si la conclusion de cette fastidieuse épopée n'était pas si aberrante et clichée. Mais, bien sûr, nous oublierons et nous empresserons à nouveau d'aller voir les nouvelles réalisations de celui qui, par le passé, a su nous séduire. Parce que, fort heureusement, on se rappelle davantage des bons coups que des mauvais.
On ressent dans les images de Besson une tentative d'ironisation, de caricature du style fantastique, mais ses efforts semblent toujours freinés par un manque d'audace et d'homogénéité.
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