L'automne dernier, les Français ont eu une curieuse idée; sortir deux nouvelles versions de leur classique La guerre des boutons à deux semaines d'intervalle. Les deux productions ont remporté un succès équivalent aux guichetd et des critiques similaires. Alors que La nouvelle guerre des boutons prendra l'affiche au Québec cet été, le premier remake de cette série aux inspirations peu distinctives, titré simplement La guerre des boutons, arrive cette semaine sur nos écrans. Le film, réalisé par Yann Samuell, ne prouve en rien l'intérêt de produire une seconde mouture à ce drame de moeurs aux assises aujourd'hui défraîchies, et encore moins celui d'en faire deux versions, aussi distinctes soit-elles. Peut-être que dans les années 60, cette histoire de deux bandes de jeunes garçons provenant de villages différents qui luttent pour leur intégrité et leur honneur en était une originale et éloquente mais, à notre époque, avec notre regard contemporain, elle nous apparaît plutôt molasse et convenue (The Little Rascals, par exemple, paru en 1994, - même s'il ne semble avoir aucun lien direct avec La guerre des boutons - s'apparente en trop de points au film français pour passer inaperçu).
La reconstitution historique s'avère, par contre, généralement réussie, tant d'un point de vue visuel qu'au niveau des informations véhiculées. On parle, sans trop appuyer sur les détails, de la guerre d'Algérie, de la religion (omniprésente à l'époque), de la vie rurale et de l'éducation de manière assez juste et crédible. Les paysages, quoique très peu nuancés, sont aussi révélateurs d'un mode de vie révolu. Dommage que la caméra, qui tente parfois quelques manoeuvres intéressantes, reste polie la plupart du temps, laissant toute la place à ses jeunes acteurs mignons, oui, mais souvent imparfaits. Ce n'est pas tant le talent des comédiens qui fait défaut dans ce film, mais la manière dont on les as dirigés, comme si la grosseur du jeu, l'accentuation des émotions, rendait la chose plus vraisemblable, plus convaincante. Pas besoin d'un doctorat en théâtre pour comprendre que l'exagération ne donne jamais des résultats efficients, surtout au sein d'une histoire aussi réaliste.
Et comme c'est souvent le cas avec les oeuvres françaises, on se frotte ici à un problème d'intelligibilité (probablement le même genre de difficultés que rencontre un Français en regardant un film québécois). « Peigne cul » et « couille molle » ne sont pas ce qu'on pourrait appeler les pires insultes de notre dictionnaire. Pour nous, ces expressions sont mêmes ridicules et bien peu insultantes (au même niveau que « putain » n'est pas un sacre pour un Québécois habitué d'exploiter les termes religieux). Cette distance linguistique nous empêche peut-être de nous sentir aussi impliqué qu'un Français le serait dans l'histoire.
Le long métrage souffre aussi de plusieurs longueurs. Le récit prend beaucoup de temps avant de se conclure, ce qui n'aide en rien à conserver l'attention du spectateur, déjà dérangé par quelques inconséquences actancielles (la mère change de comportement si brutalement qu'on a peine à y croire et l'insistance qu'on fait sur les boutons manquent foncièrement de substance et de cohérence).
La guerre des boutons renferme plus de points négatifs que de positifs. La trame narrative n'amène rien de suffisamment solide - et différent - pour maintenant l'intérêt de son public et les acteurs ne peuvent non plus récupérer l'attention de l'audience avec leur jeu faible. Peut-être que la perspective d'un adepte du film original serait autre, mais cette version de La guerre des boutons ne donne pas plus envie de connaître l'oeuvre initiale que de visionner la prochaine relecture de Christophe Barratier.
Le film, réalisé par Yann Samuell, ne prouve en rien l'intérêt de produire une seconde mouture à ce drame de moeurs aux assises aujourd'hui défraîchies, et encore moins celui d'en faire deux versions, aussi distinctes soit-elles.
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