La forêt nipponne Aokigahara est tristement célèbre pour être un lieu de prédilection pour les gens qui veulent se suicider. Elle porte également malheur aux cinéastes américains qui tentent de l'exploiter. Après l'accueil glacial au Festival de Cannes réservé à The Sea of Trees de Gus Van Sant où Matthew McConaughey allait s'y perdre, c'est au tour du suspense horrifique The Forest de saboter l'endroit du parfait film d'épouvante.
Il y avait pourtant matière à quelque chose d'effrayant. Sans nouvelle de sa jumelle qui s'est aventurée dans cette forêt où rôderaient des fantômes, des esprits et peut-être même des démons, Sara (Natalie Dormer de la série Game of Thrones) part au Japon pour la retrouver. Elle reçoit l'aide d'un journaliste (Taylor Kinney, un habitué de Chicago Fire) qui lui dégote un guide. Évidemment, la règle de ne pas s'écarter du "droit chemin" ne tient plus et encore moins celle de ne pas s'y trouver pendant la nuit...
Un malaise s'installe rapidement devant ce premier film de Jason Zada qui a fait sa marque sur Internet. Malgré trois scénaristes et la présence d'un producteur chevronné (David S. Goyer qui a beaucoup écrit pour Christopher Nolan), le long métrage ne propose rien d'autre que de reprendre tous les clichés possibles et inimaginables dans l'ordre attendu : les rêves envahissants, le sous-sol menaçant, le noir angoissant, etc. Jusqu'à cette ultime apparition téléguidée qui est omniprésente dans le cinéma horrifique américain des dernières années.
Au lieu de puiser à même la riche histoire du septième art japonais qui est spécialisé dans le surnaturel (Ugetsu, Jigoku, Onibaba, Kwaidan, House...), le récit verbeux et dénué d'humour montre plutôt que de suggérer, expliquant ce qui se passe à l'aide de trop nombreuses ellipses, surlignant presque ce transfert de la réalité à la démence. Pas question alors que la mise en scène épouse le labyrinthe mental de sa protagoniste et de cette forêt digne du Tartare. Mieux vaut suivre le sentier de la facilité, de ce passé qui continue à hanter et de ces multiples hallucinations. Cela donne une finale particulièrement risible où l'attente ne se transforme pas en frissons, mais en frustration devant tant de manipulation. On entre dans cette création avec l'espoir d'y voir développer une ambiance, une atmosphère et la promesse s'évanouit dans l'air que trop rapidement. Car oui, il y avait un potentiel dissimulé au sein de cette vulgaire boîte de Pandore.
Plutôt que de toujours lorgner vers les Insidious et les Sinister de ce monde, pourquoi ne pas avoir pris exemple sur des cinéastes locaux (comme Hideo Nakata, Sion Sono et Kiyoshi Kurosawa) afin de travestir le genre et y insuffler un réel sentiment de menace? Cela aurait évité que The Forest ne rejoigne The Woman in Black: Angel of Death, Paranormal Activity: The Marked Ones, The Devil Inside et The Unborn à la traditionnelle liste des mauvais films d'horreur qui prennent l'affiche à chaque début d'année.