End of Watch commence fort. Très fort. Une poursuite en voiture d'un réalisme saisissant, à partir de la caméra installée dans le pare-brise d'une voiture de police, qui se termine avec une fusillade aussi déstabilisante qu'élégante, voilà qui donne le ton à un film qui se targue d'être audacieux. En effet, il l'est en premier lieu, lorsqu'il installe autant la complicité entre les deux héros - des partenaires d'une grande loyauté, des héros du quotidien - qu'il met en place sa mécanique de caméra intradiégétique, c'est-à-dire une caméra qui est intégrée à l'intérieur de l'histoire, qui est manipulée par les personnages. Sauf que lorsque le film se met à tricher sur son propre concept, on perd un peu d'intérêt. Et plus le film avance, plus l'audace s'étiole...
Le réalisateur David Ayer connaît bien le milieu policier de Los Angeles, comme en fait foi sa filmographie qui comprend Training Day (comme scénariste) et Street Kings (comme réalisateur et scénariste). Cela est apparent dans le film, qui semble décrire avec précision les détails du quotidien exigeant de ces policiers qui ne connaissent que la méthode forte. Les thématiques - comme c'est souvent le cas avec les personnages policiers - de loyauté, d'héroïsme et de justice sont fortes et le scénariste propose plusieurs situations fortes et signifiantes en ce sens, surtout parce que les situations sont crédibles. Dans un premier temps.
Par la suite, le contexte (et surtout la finale) fait appel aux plus fieffés clichés de films policiers, ce qui diminue grandement l'effet de surprise, et de ce fait l'intérêt. Jake Gyllenhaal et Michael Peña peuvent bien être excellents - et ils le sont - on n'adhère pas entièrement à la situation tellement elle semble forcée. Une grande partie de ce problème vient aussi de cette décision d'installer la caméra à l'intérieur de l'histoire; un processus qui s'avère souvent lourd lors de la conclusion, comme on l'a constaté avec Chronicle et avec Project X plus tôt cette année.
Car après avoir installé ses caméras dans le contexte de l'histoire pour filmer les héros, le scénariste est confronté à un problème : qui filme l'antagoniste? La solution qu'il a trouvée est décevante (l'antagoniste se filme lui-même) et va à l'encontre même du concept de caméra intradiégétique proposée; en effet, maintenant qu'on sait qui tourne les images, la question devient : qui monte les images?
Et il n'y a pas de réponse à cette question, du moins pas à l'intérieur du film. End of Watch est donc coincé par son propre concept, lui qui tombe dans un piège qu'il s'était lui-même tendu. Bel essai, mais la mission n'est pas accomplie, et on ne peut faire autrement que d'être un peu déçu.