Déjà, reprendre une franchise si jeune (le premier film de Sam Raimi date du début des années 2000) représentait un risque fort important. Beaucoup de fans se sont attachés au Peter Parker de Tobey Maguire et comme il est apparu au grand écran pour la dernière fois il y a à peine cinq ans, les comparaisons avec la version d'Andrew Garfield seront inévitables. De plus, on a tenté un nouveau portrait du héros; un adolescent plus sportif dont les parents se sont enfuis apeurés il y a plusieurs années, qui défend les étudiants harcelés par les brutes, qui s'intéresse à la science et qui est secrètement amoureux d'une blonde studieuse dont le père est le chef de la police. Un profil bien différent que celui qui nous avait été brossé en 2002. Ces nombreuses disparités entre le personnage de Maguire et celui de Garfield dérangeront probablement ceux qui ont connu l'homme-araignée au grand écran, mais les plus fervents savent que Spider-Man n'a pas une généalogie unique.
L'histoire dans son ensemble reste assez intéressante puisque le personnage est en soi assez intéressant pour faire l'objet de plusieurs films (suites ou remakes). Même si l'oeuvre dure 136 minutes, elle n'a que très peu de temps mort et réussit à rester intrigante jusqu'à la fin (prévisible). Peut-être, par contre, que les scénaristes auraient pu s'évertuer à être plus originaux quant à l'enchaînement de certaines situations. Le Lézard découvre, par exemple, qui se cache derrière le masque de Spider-Man à cause d'une étiquette nominative et le super-héros est sauvé inopinément par un ouvrier qui le voit à la télé et qui décide de faire aligner les grues de la ville pour faciliter son déplacement en clamant sans grande conviction « C'est le gars qui a sauvé mon garçon! »; on parle de conjonctures tirées par les cheveux...
Dans un film comme celui-ci, on s'attend à ce que les effets spéciaux soient impeccables et que l'action écorche l'écran jusqu'à nous emporter dans son tumulte. Malheureusement, malgré les audacieux 215 millions $ investis dans la production, le visuel de The Amazing Spider-Man n'impressionne pas comme il le devrait. On semble avoir tout misé sur la scène finale, bien impressionnante en IMAX mais trop courte pour l'effort qu'on semble y avoir mis.
Le Lézard, qui est un fait un scientifique aux vocations honorables qui travaille avec les reptiles dans le but d'extraire leurs facultés régénératrices et les transmettre à d'autres espèces, est plutôt fade. Peut-être que si ce monstre avait été la vedette du premier chapitre en 2002, le public aurait été étonné par sa mouvance particulière et sa physionomie humaine, mais, dix ans plus tard, le gros lézard qui attaque la ville n'a rien de sidérant. Et les blagues le comparant à Godzilla n'ont pas non plus de résonance suffisante pour qu'on s'en préoccupe. En fait, l'humour n'est jamais vraiment à point. On sent la tentative de dérision, de sarcasme, mais elle n'est pas suffisamment au diapason pour nous faire rire.
Emma Stone est lumineuse, comme à son habitude, mais son personnage de Gwen Stacy s'avère par contre plutôt ennuyeux. On tente de nous montrer son entêtement et son intelligence, mais on ne lui laisse pas suffisamment de temps à l'écran pour vraiment s'y attacher et l'apprécier. Quant à Andrew Garfield, il donne une performance acceptable, mais ne détrône pas celle de Maguire. Il nous présente un protagoniste plus dégourdi, d'emblée plus téméraire, mais pourtant pas plus intéressant.
The Amazing Spider-Man laisse perplexe. Ce n'est pas une réussite, ce n'est pas un échec non plus, c'est plutôt une tentative désespérée et transparente de ne pas abandonner une vache à lait si lucrative (la dernière franchise a récolté plus d'un milliard $ en Amérique du Nord) et si aimée du public. Reste à voir si les millions de spectateurs suivront les extravagances de Sony de relancer une franchise à peine défraîchie...