Exil est un film à petit budget (comme la plupart des films indépendants québécois), un film dont l'action se déroule dans plusieurs pays et dans lequel on y parle plusieurs langues. Exil est une oeuvre audacieuse avec un sujet ambitieux et des valeurs universelles. Le film n'arrivera probablement pas à se démarquer, perdu dans une programmation estivale diversifiée, dominée par les méga-productions hollywoodiennes toutes-puissantes, mais Exil mérite tout de même qu'on s'y intéresse, si ce n'est que pour la force tranquille qui s'en dégage et le défi d'un projet comme celui-ci représente et qui a su être relevé.
Le long métrage de Charles-Olivier Michaud est découpé en autant de parties qu'il a d'adjuvants. Certaines de ces alliances se terminent dans le sang, d'autres par de déchirants adieux, mais à chaque fois il y a une cassure et une reprise de l'action par un autre personnage. Nous avons parfois l'impression de voir la transposition d'un roman et de ses chapitres à l'écran. Et comme le film est narré par ce qu'on s'imagine être une version plus âgée du protagoniste, et que cette narration est omniprésente, presque ubiquiste, le sentiment d'une oeuvre adaptée est d'autant plus fort. Personnellement, j'aime la narration dans un film, j'aime que le héros nous introduise son histoire et nous la commente ponctuellement - ça rythme le récit, le complète et le coordonne - mais cette narration souveraine utilisée dans Exil alourdit malheureusement le film et empêche, ultimement, les personnages de briller comme ils le devraient.
La narration laisse tout de même échapper quelques commentaires et images intéressants qui amènent à s'arrêter et à réfléchir. Comparer New York à un labyrinthe dans lequel on fait courir des rats est, par exemple, une métaphore très forte et évocatrice. Le concept des « Anges de la Providence », qui aident sans le vouloir une personne à accomplir son destin, n'est peut-être pas suffisamment bien approfondi, mais il a tout de même une résonnance intéressante dans le récit et une portée globale cohérente.
Francis Cleophat porte habilement le film sur ses frêles épaules. Il ne peut éviter quelques inégalités dans son jeu, mais il reste tout de même convaincant du début à la fin. Les Québécois Julie Le Breton et Paul Doucet, pourtant toujours excellents, sont moins efficaces dans leur rôle respectif qu'on aurait pu l'espérer. Ils paraissent inconfortables dans la peau de cette travailleuse sociale et de ce bandit montréalais. On peut probablement excuser ces imperfections par la courte durée qu'ils ont pour se faire valoir à l'écran, mais reste qu'ils n'arrivent pas à se démarquer du lot, comme aucun des acteurs secondaires d'ailleurs.
Exil a ses défauts, mais s'avère généralement assez juste. Un tout petit film qui mérite l'attention des cinéphiles, mais qui, face à des robots de métal (Transformers: Age of Extinction sort au même moment), ne peut faire autrement que de devenir invisible.