Le titre était certainement accrocheur. Et même s'il ne pouvait être plus évident que nous n'aurions pas droit ici à un polar, nous avons eu une réaction humaine à l'écoute de ce film et attendions, inconsciemment, une chose qu'il était évident d'emblée que nous ne recevrions pas. Ne cherchez pas le polar dans Ceci n'est pas un polar, malgré les brides d'un crime et l'ambiance lugubre de l'ensemble, le long métrage de Patrick Gazé est bien davantage un drame qu'un film policier. L'histoire de ces deux âmes solitaires et déconfites prend une place plus importante au sein du récit que les méfaits qu'on y juxtapose, trop tard d'ailleurs.
La morosité y est intrinsèque. Il y a une lourdeur dans ce film, une gravité qu'il est difficile d'ignorer. Les personnages sont dans cet état d'esprit mélancolique qui finit par contaminer le public. Ceci n'est pas un polar ne transpire pas de bonheur et de gaieté, et même si son principal intérêt n'était certainement pas d'amuser son public, sa grisaille funèbre contribue progressivement au désintérêt de certains de ces spectateurs (dont je fais partie).
Entendons-nous, ce ne sont pas toutes les oeuvres taciturnes qui entraînent cette indifférence chronique, et probablement que d'autres critiques n'auront pas cette même impression d'abattement face à Ceci n'est pas un polar, mais, personnellement, je n'arrivais pas à réprimer cette neurasthénie qui m'habitait et qui me rongeait plus l'histoire dépressive s'échafaudait. Les deux protagonistes, un chauffeur de taxi reclus et une femme mystérieuse au passé trouble, ne sont pas non plus les êtres les plus boute-en-train attachants de l'univers. Roy Dupuis, armé de son spleen habituel, ne nous convainc pas d'aimer son alter ego, tout comme Christine Beaulieu qui, malgré ses tentatives évidentes pour faire de sa Marianne une femme intrigante et intéressante au sein d'un récit hermétique, n'arrive pas à la rendre suffisamment aimable pour que sa fragilité nous conquière.
Gazé a choisi une ambiance calfeutrée, où la musique prend une place prépondérante, et où la sobriété est de mise. Peut-être qu'en resserrant la laisse, en coupant dans le gras (comme les scènes mettant en vedette le personnage de Gildor Roy, qui est plutôt mal défini et dont on ne comprend pas la nécessité au sein de l'histoire, même en fin de parcours), on aurait pu livrer un drame policier touchant et intrigant, mais il a fallu qu'on s'éparpille et qu'on oublie ses vraies motivations. Mais quelles motivations peut se vanter de posséder un film qui clame haut et fort ce qu'il n'est pas avant de dévoiler ce qu'il est?
Ceci est mon opinion.