Arsenault & Fils est certainement l'oeuvre la plus carabinée de la filmographie de Rafaël Ouellet, qui a proposé jusque-là des films d'auteur assez introspectifs. Bien que le cinéaste n'abandonne pas le drame de moeurs ténébreux, il plonge cette fois dans le suspense sans se soucier des carcans. Il ose un mélange des genres homogène et convaincant.
Les Arsenault font la pluie et le beau temps dans le village. Ils sont connus comme étant des chasseurs redoutables, mais aussi pour leurs activités illégales de braconnage. Adam dirige le garage familial avec son père. Quand son frère, Anthony, impétueux et imprévisible, revient au bercail et qu'Émilie, une nouvelle animatrice de radio pétillante, débarque au village, Adam perd ses repères. Il est à la croisée des chemins. Le pompier volontaire voudrait une autre vie que celle-ci, mais ses valeurs familiales bien ancrées l'empêchent de s'émanciper. Un revirement de situation inattendue l'amènera à prendre une décision rapidement qui changera son destin.
On retrouve Guillaume Cyr dans un rôle qui lui sied bien : celui du sympathique ingénu. Son Adam est profondément touchant. Karine Vanasse captive également dans la peau d'un personnage plus complexe qu'il n'y parait. Mais, c'est Pierre-Paul Alain qui vole la vedette sous les traits du fougueux Anthony. On ne peut le lâcher des yeux! Il possède un charisme redoutable qui crève l'écran. Le reste de la distribution, dont fait partie Julien Poulin, Luc Picard et Micheline Lanctôt, n'a rien à envier aux plus jeunes. Il s'agit d'un casting irréprochable dont Ouellet peut être fier.
Le réalisateur nous livre également une splendide mise en scène rurale. Ses images râpeuses et poétiques accompagnent excessivement bien son récit tendu. Rafaël Ouellet a choisi de laisser quelques zones d'ombre dans son histoire. Certains passages manquent d'explications ou de précisions, comme la finale qui nous laisse sur notre faim. Après une chasse à l'homme haletante, le cinéaste clôt son récit de façon détachée et évasive. On comprend qu'il veut laisser au cinéphile le luxe de s'imaginer la suite, mais cela le laisse plutôt dans un néant inconfortable, voire décevant à certains égards.
Son Arsenault & Fils possède de grandes qualités, tant esthétiques que narratives, mais ce n'est peut-être pas le genre d'oeuvres grand public qui renflouera les coffres.