L'idée de s'inspirer de la fraude et du vol d'identité, devenus de véritables fléaux dans notre société numérique, en était une brillante, et utiliser un personnage au nom unisexe comme Sandy laissait place à bien des situations cocasses et prometteuses en matière de sarcasme. Mais, après 50 ou 60 minutes, le concept s'effrite et on tombe fatalement dans l'incohérence et la démesure. Des chasseurs de primes, des criminels jeunes et sexy relevant d'un patron en taule, des courses en voiture rocambolesques se concluant par des carambolages ou des accidents spectaculaires, des attaques de serpents géants, des mélodrames familiaux et sociaux ainsi qu'une vulgarité omniprésente à peine justifiée par la protagoniste roturière; il y a vraiment de tout dans cette production et le mélange s'avère plutôt indigeste.
111 minutes pour une comédie, c'est déjà très long, donc, on s'attend à ce qu'un film de ce type qui ose accaparer l'attention de son fidèle public pendant si longtemps possède des arguments convaincants et une histoire suffisamment pertinente pour justifier sa durée excédant la moyenne; malheureusement, Identity Thief est loin du compte. La comédie mise presque toutes ses ressources sur l'étonnement et la surprise (comme l'avait fait de belle façon The Hangover en 2009), mais oublie d'imposer un rythme viable à son récit. Les éléments s'enchaînent à une vitesse effarante et ne trouvent jamais de véritable motivation au sein de cette histoire de vol d'identité qui devient, bien vite, superflue.
On mise aussi beaucoup sur le talent de Melissa McCarthy. Certes, dans Bridesmaids, la comédienne était la plus drôle et la plus à l'aise à l'écran même si elle avait le personnage le plus étrange du groupe, mais un bon coup ne signifie pas que tous les coups suivants seront aussi efficaces. Elle est encore amusante (elle joue, de toute façon, un personnage similaire) dans Identity Thief, mais elle ne possède plus l'impertinence et la particularité qu'elle avait dans la comédie qui nous a fait l'adopter et qui lui a valu une nomination aux Oscars (!) dans la catégorie meilleure actrice de soutien l'an dernier. Jason Bateman est, quant à lui, fidèle à lui-même; quelconque. Bateman représente, par contre, assez bien le « monsieur-tout-le-monde » naïf qui donne ses informations personnelles à une femme aimable au téléphone qui prétend vouloir protéger son identité pour empêcher les criminels de l'usurper.
Le pire dans tout cet amoncellement d'incohérences pourrait bien être la tentative ultime de sentimentalité qu'on nous sert sans réserve à la fin du récit. Une criminelle attendrie par la voix d'une fillette au téléphone ou des remords inopportuns d'une voleuse invétérée n'ont pas leur place dans une comédie aux visées caustiques comme Identity Thief. La rédemption est la dernière souffrance que nous impose cette comédie mal orchestrée et facile. Oui, on sourit à quelques endroits quand la situation dépasse l'entendement, mais ce n'est pas pour autant que c'est drôle et divertissant. C'est bien davantage un réflexe mécanique de notre cerveau épuisé par tant d'inepties qu'une véritable preuve de désennui.