À peine moins connu que H.P. Lovecraft et Stephen King, Alvin Schwartz fut un prolifique auteur américain qui a rédigé de nombreuses histoires s'adressant à un public enfant et adolescent. Le cinéma s'empare de sa littérature avec Scary Stories to Tell in the Dark, qui pourrait bien créer une nouvelle franchise.
Ce récit initiatique se déroule en 1968, pendant une des périodes les plus troubles des États-Unis, qui marque la fin de son enfance. The Night of Living Dead scandalise les gens dans les ciné-parcs, la guerre du Vietnam fait rage et l'élection de Nixon est sur le point de se concrétiser. Un point marquant pour l'humanité et pour quelques adolescents qui vivront une Halloween inoubliable. Mais pas pour les bonnes raisons, alors qu'ils tombent sur un bouquin qui libère une force maléfique...
Le long métrage produit notamment par Guillermo del Toro ressemble à s'y méprendre à un Mini-Wheats cinématographique, qui souffre évidemment du syndrome du Docteur Jekyll et de Mr. Hyde. Il possède un côté sérieux et dramatique qui puise à fond dans les troubles de l'adolescence, ouvrant une brèche vers le passé accablant. Autant le livre est source de hantise, autant il peut également devenir objet de libération, afin de faire la paix avec ses démons intérieurs et réparer d'anciennes blessures en effaçant les injustices d'antan. Un programme à saveur psychologique qui utilise la menace sur le plan métaphorique, comme ce fut le cas de It et, prochainement, du surprenant L'heure de la sortie.
Puis il y a ce côté givré et grotesque qui se manifeste lors des séances d'effroi. Ces moments sont plus dégoûtants que réellement effrayants, se vautrant dans ce plaisir de voir des personnages se faire avaler tout rond par des croque-mitaines. Si la trame narrative s'avère prévisible, ces instants de libération ne le sont pas. Les peurs des protagonistes se manifestent librement à l'écran, faisant sourire par leurs formes et apparitions biscornues, ce qui risque tout de même de rendre inconfortable un jeune public peu habitué à ce type d'exercice.
Le film se permet d'y aller à fond, car il sait que ses personnages ne sont guère intéressants. Malgré la compétence de l'interprétation, le spectateur se retrouve avec les mêmes archétypes que d'habitude. Des êtres qui ne méritent très souvent que ce qui leur arrive. Ils ne sont d'ailleurs que des pions dans ce projet maîtrisé du cinéaste norvégien André Ovredal, qui devient de plus en plus un spécialiste en la matière après ses très réussis The Autopsy of Jane Doe et Trollhunter. Le voilà s'amuser avec une matière première parfois rachitique, créant un sentiment d'angoisse uniquement grâce au brio de son ambiance et de son atmosphère.
Cela ne permet peut-être pas à Scary Stories to Tell in the Dark d'atteindre le stade supérieur du malaise et de l'épouvante comme ce fut le cas récemment avec Midsommar, mais de divertir sans trop de déplaisir, d'aller un peu plus loin que les Goosebumps et autres The House with a Clock in its Walls qui visaient une clientèle moins mature. Surtout que la conclusion ouvre grand la porte à une suite, ingrédient par excellence d'un succès.