Pour cette énième (et redondante) collaboration entre Tim Burton et Johnny Depp, le maître du cinéma fantastique s'attaque à un conte mythique qui semblait seoir particulièrement bien à son style. Après l'échec du ronflant Sweeney Todd: The Demon Barber of Fleet Street, il fallait que Burton se ressaisisse, retrouve ce qui avait fait le charme d'Edward Scissorhands (on parle quand même de 1990) et de Sleepy Hollow pour faire renaître la magie qui en a fait l'un des créateurs les plus appréciés du cinéma hollywoodien contemporain. Une autre fois, peut-être.
La jeune Alice s'apprête à recevoir une demande en mariage embarrassante. Lorsqu'elle aperçoit un lapin blanc muni d'une montre, elle se lance à sa poursuite dans la forêt anglaise et tombe dans son terrier. Au beau milieu de créatures étranges, Alice devra mettre la main sur une épée qui devrait lui permettra de vaincre la Reine Rouge et son Jabberwock, une terrifiante créature ailée. Pour l'aider dans sa quête, elle s'associe au Chapelier fou et à la Reine Blanche, et devra redoubler d'adresse afin de déjouer les dangers.
Le déroulement inégal de cette histoire bien connue s'explique peut-être par la simplification qu'on en a fait : plutôt que de miser sur la richesse des personnages secondaires, sur la leçon qu'ils portent peut-être en eux, on a misé sur la star hollywoodienne, celle qui permet de faire un marketing plus efficient et d'en récolter les profits. Alice in Wonderland s'avère donc être franchement insuffisant, aisément oubliable, souvent juvénile malgré le potentiel de ses thématiques. Il faut dire aussi que cette histoire (qui date de 1865) et ses subtilités résolument british trouvent difficilement le même écho dans le cinéma contemporain et semblent plutôt anachroniques.
Mia Wasikowska, qui en est à un premier rôle d'envergure, manque franchement de charisme dans le rôle d'Alice, devant de toute façon se contenter du second plan. Toute la place est laissée à Depp, qui n'impressionne guère, lui qui réutilise des trucs devenus vieux d'une folie qui devient de plus en plus prévisible. Qu'un film soit prévisible, c'est une chose, mais que le jeu des acteurs le soit aussi... Et puis cette danse! Euh?
Le film n'est pas « mauvais », pas « désagréable », juste inoffensif, anodin. Bof. Plusieurs expressions consacrées impliquent la notion de « valeur » (« valoir la peine », « valoir le détour », etc.), et force est d'admettre qu'Alice in Wonderland ne vaut pas les efforts ($$) qu'on y a mis. Parce que les effets spéciaux ne peuvent justifier à eux seuls une entreprise aussi audacieuse, surtout quand le résultat est à ce point conventionnel. C'est signé Tim Burton, mais ça pourrait être n'importe qui.
Comme il fallait (sans doute) s'y attendre, la seule échappatoire qu'aura (encore une fois) Burton pour sauver son film du désaveu général : la direction artistique, les effets spéciaux; le remplaçable, quoi. Mais il ne faudrait pas oublier que le cinéma est capable d'autre chose que d'être une simple attraction foraine, de montrer des belles couleurs et de la « créativité » (sorte d'euphémisme pour « trip d'acide raté »). Cette démonstration de « savoir-faire » de Tim Burton est, encore une fois, insuffisante. Un film mineur, en somme, souffrant de plusieurs longueurs par-dessus le marché, qui n'est pas inventif ni convaincant d'autant qu'il sent la facilité, le raccourci. Tim ne se met plus tellement au défi...