Certains avaient la conviction qu'Unbroken avait l'étoffe d'être des Oscars, que ce drame biographique sur le coureur olympique qui fut le prisonnier des Japonais pendant la Seconde Guerre mondiale se retrouverait parmi les finalistes de la catégorie meilleur film, mais il semble que nous avons été naïf de le croire ou mal informé puisque le long métrage d'Angelina Jolie n'a pas la même force que les autres prétendants au prestigieux trophée, et ce, malgré la présence des frères Coen au générique. Trop lourd et long pour être inspirant et trop inégal pour être percutant, Unbroken manque de colonne au contraire de son protagoniste qui nous apparaît ici comme un surhomme (peut-être l'était-il, mais nous ne sommes pas là pour juger des compétences de l'être vivant qui a inspiré la fiction de Jolie).
Le film fait l'éloge de l'endurance, mais n'applique pas ses propres préceptes. Le long métrage s'étiole rapidement. Le début est pourtant assez captivant, avec ses nombreux retours en arrière, de l'enfance à ses premières armes en tant qu'athlète puis à sa participation aux Jeux olympiques, mais ce montage rythmé qui nous maintenait en haleine disparaît rapidement pour laisser place à un récit linéaire qui perd de sa vigueur au fil des minutes et des heures. Le film est irrémédiablement trop long. Il faut de la viande pour conserver l'attention de son public pendant deux heures quinze minutes et malheureusement les nombreux sévices qu'a subis Zamperini sont certes terribles, mais n'arrivent pas à nous émouvoir suffisamment pour nous garder concentrés.
La réalisatrice utilise aussi des techniques assez dépassées formalistes pour faire passer son message et l'émotion qui y est associée. Les hymnes héroïques qui nous sont balancés en plein visage quand le héros accomplit un geste symbolique s'avèrent davantage clichés qu'émouvants. Un film qui parle de détermination, de courage et de bravoure ne devrait pas être aussi conventionnel, du moins pas s'il a l'intention d'attirer l'attention des votants de l'Académie, et même celle du public.
Heureusement, les acteurs brillent par leur force tranquille. Jack O'Connell, qu'on a vu plus tôt cette année dans la suite de 300, livre une performance digne des meilleures de l'année. Il aurait été facile de jouer trop gros un rôle comme celui-là, mais O'Connell est au diapason de l'intensité de chacune des scènes. La rage de vivre de son personnage transparaît à l'écran malgré la mollesse de la trame narrative. Le chanteur et guitariste japonais Takamasa Ishihara fait également un travail exceptionnel dans le rôle de L'oiseau, le général chargé de veiller sur les prisonniers, considérés comme des ennemis du Japon.
Unbroken manque sa cible. Le long métrage n'est pas un échec complet, mais sa personnalité est si effacée qu'il ne mérite pas sa place parmi les grands. Certains disent que confié à un « vrai » réalisateur, ce film aurait été bien meilleur. Je ne suis pas complètement d'accord avec cette affirmation, mais on ne peut nier ici le manque d'expérience de la réalisatrice. Elle a probablement voulu laisser toute la place à ses acteurs magistraux, mais la disparition du cinéaste entraîne parfois la décomposition de l'âme d'un film...