Le dernier-né de Joel Schumacher, réalisateur prolifique, offre la démonstration d'un savoir-faire technique impressionnant, d'un œil artistique bien développé, mais pas suffisamment d'une oreille musicale rigoureuse. C'est à se demander si les créateurs ont écouté les chansons en même temps que le film.
Saturée de chansons – plutôt de chansonnettes – pour le moins douteuses, cette adaptation passablement baroque du travail d'Andrew Lloyd Webber, The Phantom of The Opera, d'abord tiré d'un livre de Gaston Leroux, s'avère un agréable moment à regarder, à vivre, à cause de son ambiance savamment construite.
Joel Schumacher est un réalisateur très expérimenté (Phone Booth, Batman & Robin, 8MM, The Client) et il prouve son savoir-faire technique en filmant avec un académisme de rigueur toutes les scènes de son film. Ce n'est ni innovateur, ni exceptionnel, mais c'est pertinent. Sa réalisation porte avec elle, par moment, de grands airs de romantisme euphorique, tandis que certaines séquences sont cruellement glauques. Le véritable travail visuel s'effectue au niveau de la direction-photo - personne ne retiendra pourtant le nom du brillant directeur-photo responsable de ce tour de force! – l'architecte responsable de l'aspect le plus intéressant du Fantôme de l'opéra, son ambiance-protée tout à fait prenante. La facilité avec laquelle il (John Mathieson, directeur-photo) surcharge les différents décors confère à l'ensemble du film une délicieuse rigueur encore trop rare. Le repaire du fantôme est d'une sévérité fort intéressante, si l'on compare avec le personnage, tandis que le théâtre offre à ses visiteurs une sublime allure chryséléphantine. Le jeu d'ombre et de lumière s'avère également un angle très étonnant à examiner, pour sa précision intraitable.
Au niveau des acteurs, si certains choix semblent plus que douteux, la très jolie Emmy Rossum offre une prestation pleine d'assurance, d'autant qu'elle chante elle-même ses chansons (dans la version originale anglaise, bien sûr). Ses prétendants masculins, Gerard Butler et Patrick Wilson offrent un jeu peu nuancé, tandis que Minnie Driver exècre totalement dans un rôle plein d'excès volontaire.
Les chansons occupent une place majoritaire dans le film et c'est agaçant à un moment, lorsqu'on se dit, en fait, que le résultat final aurait eu beaucoup plus de caractère avec des dialogues plus…classiques. Bien sûr que Le fantôme de l'opéra est une comédie musicale et que c'est normal qu'il soit chanté, mais quand les interractions entre les personnages en souffrent, ce n'est peut-être pas l'idéal. Il ne s'agit pas d'aimer ou de ne pas aimer la musique, il s'agit de se rendre compte qu'elle ne sert pas sufisamment bien l'histoire, comme c'était le cas avec d'autres comédies musicales comme Dancer in The Dark, Chicago ou Moulin Rouge. Les dialogues sont parfois même difficiles à saisir tellement les fioritures vocales excessives encombrent l'ambiance sonore. C'est que les chansons sont répétitives, longues et qu'elles engourdissent et amenuisent l'attention des spectateurs qui, à défaut d'êtres fascinés par les décors, s'endormiront probablement sur les complaintes et les élégies des personnages peu-cernés offerts par le réalisateur.
Dans la course aux Oscars prochaine, il va de soi que, excepté dans des catégories plus techniques comme les décors, Le fantôme de l'opéra n'a pas de véritable place. Son manque de substance lui coûte très cher, surtout s'il ne parvient pas à séduire complètement avec ses chorégraphies et ses chansonnettes anodines. La version anglaise est, à tout le moins, à conseiller.
Le dernier-né de Joel Schumacher, réalisateur prolifique, offre la démonstration d'un savoir-faire technique impressionnant, d'un œil artistique bien développé, mais pas suffisamment d'une oreille musicale rigoureuse. C'est à se demander si les créateurs ont écouté les chansons en même temps que le film.
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