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Apocalype minimaliste.
Le créateur de l’une des séries les plus marquantes de la décennie passée, Sam Esmail, débarque sur Netflix avec son premier long-métrage. Rien que pour ça, « Le monde après nous » est un projet très attendu. Il y a cependant d’autres raisons notables : parce qu’il adapte un roman qui avait fait parler de lui l’an passé, que c’est un film qui s’inscrit dans un genre très tendance – le film catastrophe et/ou postapocalyptique – et qu’il réunit un très beau casting composé de Julia Roberts, Ethan Hawke, Mahershala Ali et Kevin Bacon. Les astres du cinéma semblaient donc réunis pour ce projet, le résultat est cependant pour le moins atypique.
En effet, « Le monde après nous" est une œuvre singulière, particulière et étrange qui va probablement laisser beaucoup de monde sur le carreau, entraîner moultes débats et diviser les spectateurs. Tant mieux! A-t-on envie de dire, puisque c’est également le propre du septième art d’interpeller, d’être clivant et, conséquemment, d’entraîner du débat. En effet, pour ceux qui s’attendent à un film bourré d’action, de séquences de destruction massive et de sauvetages en tout genre, passez votre chemin. Ici on est davantage dans une œuvre psychologique, qui intériorise la peur de la fin du monde et la circonscrit presque quasiment à une unité de lieu : une belle demeure de riches rurale à Long Island.
Tout le sel du film vient de deux choses éminemment importantes pour tout film de ce genre et que beaucoup de productions hollywoodiennes ont tendance à oublier : une atmosphère inquiétante et anxiogène et des personnages creusés, fouillés et tangibles pour qui on peut avoir de l’empathie. Ou de l’aversion, mais en tout cas ressentir quelque chose. Du côté du premier point, c’est une grande réussite tant le climat est angoissant et que la menace volontairement gardée indicible nous assaille. Le choix de ne pas la matérialiser, de laisser les causes de ce début d’effondrement sociétal troubles est risqué mais fonctionne parfaitement ici. La musique et le montage sonore très marqués participent aussi beaucoup dans la réussite de ce facteur important au sein de ce type de film et avec ces aspirations. En ce qui concerne le second point, c’est clairement une gageure puisqu’on a bien le temps de prendre le pouls, le profil et les ressentis de chacun des protagonistes. Ils ont un background clair, des traits de caractère identifiés et des motivations qui divergent mais qui sont bien caractérisées, ce qui permet de s’intéresser puis de s’accrocher à eux et de nous poser la question essentielle du comment réagirait-on à leur place. Certes, un ventre mou et bavard au milieu du film, qui est déjà plutôt lent mais à raison, aurait pu être évité. Si « Le monde après nous » avait fait deux heures plutôt que deux heures et vingt minutes et gommé quelques bavardages inutiles, on n’aurait rien eu à y redire.
Si l’ensemble du film et la manière dont il traite son sujet pourra donc rebuter du monde, on sent néanmoins deux influences majeures dans ce premier film d’Esmail : thématiquement et formellement. Au niveau du sujet, de la façon de la traiter et de l’ambiance, on pense beaucoup aux films de M. Night Shyamalan comme « Phénomènes » ou son dernier opus, l’excellent « La Cabane dans les bois » le twist final en moins. Sur la forme, Esmail use (et abuse un peu parfois) des plans alambiqués à la David Fincher, notamment ceux de « Panic Room ». On comprend cette envie de filmer de manière particulière comme l’est le film mais c’est parfois trop poussé et plus que de raison. Malgré le choix de rester dans un mode minimaliste, deux séquences nous collent pourtant à notre fauteuil par l’efficacité de leur mise en scène et leur côté complètement inattendu et tétanisant: il s’agit de celle du pétrolier et de celle des Tesla. Pour terminer, la fin abrupte comme jamais va en décontenancer la majorité et en frustrer certains autres, mais elle est conforme au reste du film et nous laisse avec une morale cinglante en plus de celle qui sous-tend tout « Le monde après nous » : l’abus des technologies qui va mener les sociétés occidentales à leur perte et à l’isolement puis la division.
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Je me déguise ?
...n'est-ce pas un scénario déguisé au conflit qui se passe outre-mer avec "les enfants du paradis" ?