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Feu de paille et de joie.
Avant de vous aventurer dans la salle pour découvrir « Ema » il est bon de savoir que ce n’est pas une proposition de cinéma comme on en voit régulièrement. C’est d’ailleurs ce qui fait son charme mais qui peut aussi poser ses limites, tant ce long-métrage est particulier et difficile d’accès. Pas qu’il soit violent, vulgaire, choquant ou même sexuellement explicite mais son atmosphère et les actions du personnage principal peuvent décontenancer par leur morale plus que singulière. Le cinéma du chilien Pablo Larrain est plutôt clivant et ses films divisent souvent l’opinion en deux. Si nous avions adoré le très controversé « El Club » et ses prêtres pédophiles en rémission, le biopic lancinant et atone, « Jackie », sur l’ancienne Première Dame américaine nous avait totalement laissé de marbre. Ici, c’est mi-figue mi-raisin. Si certaines séquences sont envoûtantes et font montre d’un grand talent, que le film est bourré de nombreuses qualités, le ressenti général laisse parfois dubitatif et certaines choses laissent circonspect.
L’histoire contée ici est sans conteste originale. Un peu trop même. Ceux à l’œuvre au scénario et qui l’ont imaginée manquaient peut-être de clairvoyance car ce qui se passe ne semble vraiment pas toujours très crédible alors que le film est censé se dérouler dans un univers réaliste. On a d’abord du mal à croire aux liens qui unissent ces personnages. Mais surtout à comprendre ce couple qui adopte pour faire machine arrière suite à un accident et finalement voir la jeune mère revenir sur sa décision et draguer séparément le mari et la femme du nouveau couple qui accueille l’enfant pour de nouveau s’en rapprocher. Impossible de s’identifier à un des personnages ou d’avoir de l’empathie pour eux. Et tout cela fondu dans un maelstrom d’images confrontant la danse, le feu et la maternité. On n’est donc pas toujours très sûr de ce que veut nous dire et nous raconter Larrain. Pourtant, par intermittences, on se prend au jeu du film. Ce qui entre les mains d’un cinéaste comme, au hasard, Asghar Farhadi aurait donné une tragédie puissante aboutit ici à une œuvre protéiforme au pouvoir sporadiquement hypnotique mais qui pourra décontenancer aussi et/ou ennuyer copieusement. Parfois c’est le cas et à d’autres moments on est emporté par ce sublime tourbillon d’images et d’émotion(s). Dommage que cela ne soit pas exponentiel et/ou régulier sur toute la durée du film.
Car, en effet, les images concoctées par le cinéaste sont à se damner. La ville de Valparaiso est filmée (et magnifiée) sous toutes les coutures. Le cinéaste semble avoir cherché les coins les plus aimables à l’œil et à l’image dans la ville. Ses plans sont travaillés de manière à la rendre encore plus attirante. Quant aux scènes de danse, si ce n’est pas les chorégraphies à proprement parler qui nous emportent, c’est encore une fois la manière dont elles sont mises en scène (comme ce ballet inaugural incandescent avec cette boule de feu en arrière-plan). Il y a également une foultitude de fulgurances visuelles comme ce premier plan majestueux où le personnage principal brûle un feu tricolore au lance-flammes. Ou encore ces scènes où Ema fait l’amour avec différents personnages entre néons flashy et montage alterné. C’est pour ça qu’il est dommage que « Ema » soit parfois si hermétique et étrange. Et donc clivant. On aurait adoré plus aimer. Finalement on sort de la séance perplexe. Persuadé d’avoir vu quelque chose de fort et différent mais aussi quelque peu prétentieux, opaque et peu crédible, notamment à cause de personnages auxquels on ne s’attache jamais vraiment et qu’on ne comprend pas.
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