On ne peut que constater les qualités techniques, artisanales, d'un film comme À l'origine. Un film qui a aussi le mérite d'oser aborder un sujet délicat, souvent réduit jusqu'à sa plus simple expression, celui de la rédemption. Mais il n'est pas donné à tout le monde de faire avancer les débats. Au mieux, À l'origine fait la synthèse de l'état actuel des choses, mais ne permet pas d'avancer.
Lorsqu'il découvre un chantier routier abandonné du Nord de la France, un petit escroc y voit l'occasion d'exploiter la crédulité des locaux, qui ne se sont jamais vraiment remis de l'abandon des travaux il y a deux ans et qui vivent difficilement depuis. Ces derniers n'hésitent pas à lui offrir des pots-de-vin pour s'assurer qu'on choisira leur entreprise de location de véhicules lourds et d'outils. Lorsque toute la communauté joint ses efforts pour remettre le projet sur les rails, l'escroc prend le nom de Philippe Miller, responsable d'une grande entreprise de travaux et essaie de mener à bien le chantier, avec l'aide de la mairesse de la commune.
François Cluzet trouve dans À l'origine un rôle à sa mesure, qui tire efficacement parti de son talent et de son charisme. Ses co-vedettes Emmanuelle Devos et Soko sont également convaincantes, dans des rôles plus convenus. En fait, tout est à peu près convenu dans À l'origine, autant les impératifs scénaristiques qui piègent les personnages dans le déroulement narratif du récit que les dialogues, les revirements dramatiques et l'interprétation. Dans un film qui n'est pas conçu pour transmettre des émotions, mais bien pour raconter une histoire inscrite comme une fable morale dans l'univers culturel contemporain, on ne pouvait, semble-t-il, espérer davantage. Une histoire de rédemption du XXIe siècle, en quelque sorte.
La qualité évidente de la réalisation du film, autant que la justesse des dialogues et la belle part laissée aux personnages secondaires - qui sont effectivement bien mieux développés qu'à l'habitude - ne justifie que la rigueur artisanale du film, en aucun cas son « inspiration ». Les quelques pistes laissées inexplorées par le scénario sont remplacées par une finale moralisatrice qui ennuie profondément. Pourtant, le matériau était là; malheureusement, Xavier Giannoli néglige ses (quelques) moments de suspense et de tension potentiels pour recentrer l'histoire sur ses incidences morales. Qui, au final, demeurent une proposition fort modeste.
Cette rhétorique qui vise à « sauver la morale » - alors que le personnage principal, rongé par les remords, conscient de son erreur et voulant la racheter, pige dans son « profit » pour permettre de maintenir le chantier - s'allonge inutilement dans une accumulation de bons sentiments redondants et extrêmement prévisibles. C'est le lot de tous les films pour enfants, par exemple, et il n'est pas certain que la morale de À l'origine les surpasse en inspiration. En conviction, oui, mais la proposition qui est faite ne s'élève guère au-dessus de la leçon, dans sa plus primaire expression : les méchants sont malheureux, les gentils ont des amis. Avait-on vraiment besoin de se le faire répéter?