Patrick Huard va présenter son premier long métrage au public ce vendredi. Une histoire d'infidélité à travers trois frères réunis à l'hôpital à cause du coma de leur mère.
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Les 3 p'tits cochons n'est ni une comédie, ni un drame. Une comédie dramatique serait la classification la plus facile, mais aussi la plus simpliste. Parce que c'est une étude des comportements sociaux avec des blagues. C'est un film d'amour avec du réalisme.
Voyons voir ce que les artistes en pensent.
Rencontre avec Patrick Huard, Claude Legault, Guillaume Lemay-Thivierge, Paul Doucet, Mahée Paiement et Isabel Richer.
Patrick Huard
« C’est le fun de voir l’intérêt qu’on porte aux choses qu’on fait. C’est toujours ben ben l’fun, c’est juste que ca fait monter le stress. Plus je fais des entrevues plus je me rends compte que c’est vrai, le film sort. C’est pas mal là. »
Premier long métrage de fiction pour l’acteur et humoriste très populaire au Québec. Cette nouvelle responsabilité a ses exigeances propres. « J’avais fait mes classes un peu, j’avais fait de la mise-en-scène, quelques clips et un documentaire, ça m’a préparé. Sur un plateau de tournage j’ai été surpris de voir ce que je savais. Ça te rendre dans le body pendant que tu es sur un plateau comme acteur, et quant tu arrives pour l’utiliser, tu es plus confortable. Mais tu apprends tous les jours, les possibilités et les choix sont infinis. L’affaire principale qu’il faut faire, c’est simultanément être créatif, en pensant au temps et à l’argent. Ces trois choses-là font partie intégrante de ta job à chaque seconde, en même temps. »
« Quand je joue une scène dans un film, ce n’est pas ma responsabilité de savoir combien de pieds de pellicule on prend pour mon plan. Comme réalisateur, ça l’est. »
« L’affaire la plus importante que j’ai apprise, c’est d’arrêter de se battre contre la montre et contre le budget, et de travailler avec. Parce que le temps et l’argent vont toujours gagner, et toi tu vas finir deuxième. »
Le réalisateur agit comme chef d’orchestre. « Parfois tu mets ton pied à terre, tu vas dire : « je m’excuse là, mais ça me prend ça, ça me prend fucking ça. » Quand tu rentres en montage après, tu espères que la scène en question va faire la cut, parce que tu as mis de l’argent à la mauvaise place sinon. »
Il faut aussi qu’il sache coordonner une équipe. « Les premières journées j’avais de la misère avec ça. Jusqu’à ce que je me rende compte que ce n’est pas une tare, que sur un plateau de tournage ça prend un leader, et que ça adonne que c’est le réalisateur. Une équipe de cinéma ça ne demande pas mieux que d’être dirigé, motivé. »
En tant qu’ancien acteur, cela donne d’autres outils pour mieux diriger. « Tout est dans la façon de communiquer. Il faut être capable de créer des images claires pour que les gens comprennent. Par contre, je n’ai pas qu’une façon de diriger. La seule affaire que j’essaie d’expliquer à tout le monde, c’est que ça prend une clé. Il faut décider de la tonalité. »
« Après ça c’est très individuel. Je cherche ce qui parle à l’acteur. Les acteurs sont ouverts à tous les commentaires, c’est souvent ça le problème. C’est pour ça qu’il ne faut pas qu’il y ait huit personnes qui font des commentaires sur le plateau, parce que les acteurs vont les prendre. Il faut les emmener à ne plus réfléchir à ce qu’ils sont entrain de faire. Faut que ça devienne naturel et qu’ils soient dans leur zone de confort, et qu’ils le sentent. »
« Guillaume il faut vraiment qu’il le feel dans son body. Il le sent lui-même, il se fait rire lui-même, il devient spectateur et il joue en même temps. Lui, le mot « jouer », il sait c’est quoi, c’est vraiment un jeu. »
« Claude c’est un gars très musical, il met son iPod et il met des tounes. Je me suis mis à lui parler de tounes. « Ce bout-là c’est comme Coldplay ». Ça lui parle instantanément. »
Des inspirations?« Il y a plein de réalisateurs que j’aime beaucoup. Celui que j’ai admiré le plus dans ma vie, je pense que c’est Coppola. Scorsese, Arcand aussi. J’ai des chums que j’aime beaucoup qui m’ont inspiré : Canu, Podz. Soderbergh, je l’aime beaucoup. »
Dans le film, le réalisme devient essentiel. « C’est quelque chose avec laquelle je suis à l’aise. Les 3 p’tits cochons, si on ne voulait pas que ça devienne une farce loufoque, il fallait atteindre un certain niveau de réalisme. Et je crois que ça rend les choses plus drôles. On joue la situation pour vrai, et le reste arrive de soi. »
Claude Legault
Surtout connu pour son rôle dans Minuit le soir, Claude Legault est aussi très apprécié des jeunes pour ses performances dans la série Dans un galaxie près de chez vous. Dans Les 3 p’tits cochons, il incarne un homme marié qui va avoir une aventure avec une collègue de travail. « Mathieu, je pense que c’est un gars qui a assez d’énergie, qui a marié une femme de laquelle il est tombé follement amoureux. Ils ont eu des enfants, mais il se sont à long-terme perdus de vue. Le quotidien les a tués, les a éloignés un de l’autre. Il décide de saboter son couple pour qu’il se passe dequoi. En allant vers la solution la plus simple. »
« C’est un très mauvais menteur, ce n’est pas un calculateur, il n’est pas machiavélique. Il ne l’a pas. Il ne pourra pas mener une double-vie, on le voit, elle le fait craquer en deux secondes et il se dénonce lui-même. Tu vois qu’il aime sa femme. Oui, il a beaucoup de torts qui sont de son bord à lui, mais elle en a aussi, c’est partagé. C’est comme ça dans la vie, c’est une grosse zone grise, c’est ça que j’aime du film. »
Le film montre aussi les conséquences. « Des situation comme ça, ça fait mal. Ça fesse. Ça fesse les enfants, ça fesse des deux bords. Il y a des conséquences et ça fait mal. Le film le montre ça, et j’adore ça. »
Sur le plateau, cependant, l’ambiance n’est pas nécessairement minée par le sujet.. « C’était un gros party sale. Les trois gars, fallait qu’on soit totalement gamis et complices, et on a été mongols pendant un mois. Et les filles on s’entendait bien avec. Patrick nous a dirigé avec beaucoup d’affection. »
La place était grande ouverture pour la créativité des comédiens. « Il sentait qu’on avait un potentiel pour faire son film. Il nous laissait travailler, mais en même temps il tenait sa ligne directrice, et il nous dirigeait pareil. Moi, c’est ça dont j’ai besoin dans la vie. Comme un bon coach de hockey. Sur le banc et dans les pratiques, il te dit quoi faire. Quand tu est rendu sur la glace, c’est à toi de faire la job. Ce qu’il te dit, lui, c’est : « J’ai besoin d’un but. » J’ai ben trippé. »
Les gens qui vont aller voir le film ne vont pas seulement rire. « J’aimerais qu’ils se souviennent des bons moments qu’on leur a fait passer. Qu’on les a bouleversés, qu’on les a brassés. Ça me plaît autant que si on les avait fait rire. C’est ça notre job. »
Et si la réalité dépasse la fiction, qu’on confond le personnage avec l’acteur? « Ce n’est pas grave pour moi. Ça ne me dérange pas, ça ne m’affecte pas dans ma vie à moi. Ça m’est déjà arrivé dans un bar que quelqu’un voulait se pogner avec moi parce qu’il pensait que j’étais fort parce que je joue Marc dans Minuit le soir. Mais c’est un personnage, Claude Legault c’est une autre affaire. »
Guillaume Lemay-Thivierge
Le plus jeune des trois frères, Christian, gagne beaucoup à utiliser l’énergie de son interprète. « C’est un gars qui a soif de vivre, qui n’est pas heureux dans son couple, qui est très naïf. Il n’est pas tata, mais à la limite de l’inconscience. Les choses sont belles, ils ne s’en fait pas. »
« Quand tu as une candeur comme ça, le drame te coule sur le dos comme sur le dos d’un canard. »
« Le plus beau défi, c’est de jouer un être sur la ligne très très mince entre cave et juste un peu candide. Le plus gros défi, c’est de pas rire. Parce que jouer avec cette gang de clowns-là, c’est tough en sibole. Surtout les scènes à l’hôpital, c’est terrible ce qu’on dit, alors pas rire… surtout que Patrick voulait la vérité. »
« Je préfère moins répéter, et beaucoup tourner, parce que j’aime la spontanéité. Le plaisir que j’ai, c’est répéter juste un peu, en surface, et puis de le faire pour le Kodak. »
Patrick Huard en est à une première expérience à la réalisation d’un long-métrage. « Patrick est super ouvert, il est vraiment bon public. Quand c’était drôle, il riait. Quand on tournait, c’était une souffrance épouvantable de pas rire. Je n’ai jamais eu l’impression d’aller travailler en allant faire ce film-là. C’est pas juste de dire ça alors qu’il y a tellement de monde qui rushent sur leur travail, mais pour le film, c’était juste du bonheur, du plaisir. »
Avec le succès de Nitro, de Casino 2 qui est présentement en tournage, de La ligne brisée, qu’on attend l’an prochain, Guillaume Lemay-Thivierge est presque la « saveur de l’année ». « Je profite au maxium de ça, je me trouve très chanceux. Je ne fais pas de la fausse humilité, je suis content, mais je ne pense pas que je me prends pour un autre. Je ne sens pas que j’ai volé quelque chose à quelqu’un. Le seul commentaire que j’ai entendu d’un peu négatif à mon égard, c’est certaines personnes, sortant des écoles, qui disaient que je n’étais pas un acteur, mais un animateur. Ils n’avaient pas encore compris que tu ne peux pas juste toi, choisir, il faut suivre le courant. »
Paul Doucet
Tout semble bien aller pour le troisième cochon. Mais on sait que les choses n’en resteront pas là. « C’est un gars qui et arrivé quelque part dans la vie où il se sent bien. Il semble au-dessus de ses affaires, il semble contrôler sa vie. Mais c’est plutôt sa vie qui le contrôle. Sous les apparences de gars solide, il y a une quelque chose de très pathétique, et une profonde tristesse qu’il ne s’avoue pas. Il vit dans l’illusion. »
« C’est une belle tranche de vie. Quand j’ai un personnage à jouer, il y a une dimension humaine qui peut parfois être oubliée. Ils ont des qualités, ils ont des défauts,là où le cliché s’arrête, c’est que le gars est aux prises avec ses pulsions, mais en même temps, il a un amour profond pour sa femme. »
Est-ce plus facile aujourd’hui de succomber à l’infidélité? « Je suis dans une situation où il y a un retour aux valeurs. J’ai une femme merveilleuse, des enfants, et je vais me battre pour préserver ça. Mais je n’ai pas à me battre, j’ai juste à travailler. Moi je ne peux pas concevoir ma vie sa ma famille, le week-end sur deux, alors pour moi c’est à tout prix. Alors il n’y a aucune espèce de possibilité de penser à la tentation quelle qu’elle soit. »
Le film n’est pas tout à fait une comédie. « On a découvert ce scénario-là au fur et à meseure qu’on s’est laissé prendre. On va voir ce que ça aura comme impact, mais on a réalisé au fur et à mesure que ce film-là n’était pas que comique. »
Et Patrick Huard dans la peau du réalisateur? « J’ai vu Patrick une fois avec de la broue dans le toupet, c’est quand il y avait deux caméras. Fallait qu’il couvre beaucoup de choses, il avait deux caméras deux équipes et ça devenait compliqué à éclairer… mais c’est le seul moment. N’importe qui se serait fait avoir par ça. »
« Dans la réunion qu’on a faite les trois gars avec Patrick, il nous a dit : « Il y a une affaire que je veux vous dire; peu importe les idées, les flashs, gardez rien pour vous autres. Donnez-moi en. Il y a des bonnes idées qui peuvent sortir. »
Mahée Paiement
« Je joue le personnage de Josianne, une collègue de travail du personnage de Claude Legault, et je deviens sa maîtresse. »
« Les gens me disent beaucoup : « Ah, tu fais la méchante! » mais non, c’est plus subtil que ça… il n’y a pas vraiment de méchant. Tout le monde fait des choses plus ou moins discutables. Chacun a son histoire. »
Le film risque d’avoir des conséquences… même chez les spectateurs. « Ça va faire discuter des couples, ça va faire jaser les gens dans un souper de ce qu’ils pensent de la fidélité et de l’infidélité. Ça va faire réfléchir. »
Est-ce parce que dans la société il est plus facile de se séparer? « Ce n’est pas trop facile de se séparer, je trouve que c’est quand même difficile de vivre ensemble. On a souvent des vies de fous, un peu compliquées, tout va vite, on se tanne vite de tout. Dès que ça marche pas, on change de gadget, d’auto ou de partenaire. C’est un défi de vivre ensemble. »
« Même quand tu t’aimes, il faut travailler très fort. »
Isabel Richer
« Geneviève, c’est une fille qui voudrait une vie impeccable. Une famille, une relation de couple, une carrière… »
Et au-delà des clichés, elle n’est pas complètement sans reproche… « Je ne voulais pas que, avec l’adultère dans ce couple-là, on condamne le gars et qu’il soit un écoeurant. »
Reste que vivre en couple est en soi un beau défi. « Je trouve que ce qu’on s’est imporé comme type de vie de couple, c’est plus difficile qu’avant. C’est-à-dire qu’on partage tout : l’éducation des enfants, les comptes, alors les sources de conflits sont illimités. Dans le couple que je forme avec Claude, on le voit bien ça. »
« Patrick avait une maîtrise de son scénario, de son histoire, et sa façon de diriger et de parler aux acteurs, c’était extraordinaire. Tu peux avoir plein de talents, mais si tu n’es pas un bon chef d’orchestre pour gérer tout ça, la chose ne prendra pas. Et ça Patrick il l’a vraiment, vraiment. »
Le film prend l'affiche ce vendredi. Surveillez la critique sur Cinoche.com.