Dans le cadre de la sortie du nouveau film de Quentin Tarantino, Inglourious Basterds, les acteurs Eli Roth, de passage à Montréal dans le cadre de la présentation spéciale en clôture du festival Fantasia, et Mélanie Laurent sont venus rencontrer les journalistes montréalais.
Eli Roth
Est-ce votre première visite à Montréal? « Non, je suis venu à Montréal il y a six ans pour Fantasia, et comme j'ai grandi à Boston, je suis venu pour un voyage étudiant quand j'étais adolescent. »
On ne vous a pas vu très souvent devant la caméra. « Personne ne me connaît en tant qu'acteur, je ne me connais pas tellement moi-même... » Vous avez un surnom très « cool »! « Oui, très! Je l'adore. D'ailleurs, quand il m'a lu le scénario, j'ai dit à Quentin que, à Boston, tous les jeunes se promenaient avec un bâton de baseball! »
Est-ce que le film ressemble à cette première version du scénario?
Aborder une période de l'Histoire aussi connotée, c'est ajouter un sous-texte à n'importe quel film. « Oui. En lisant le premier chapitre avec les Lapadite, je me suis dis que c'était un autre niveau pour Quentin. Ce n'est pas juste une scène de tension dans un film, c'est une scène tellement réelle... Et le fait que les personnages parlent dans leur propre langue, même s'il a changé l'histoire, cela permet au film de paraître si réel! »
« Ce sentiment d'avoir l'impression de pourvoir retourner dans le temps et se sacrifier pour sauver des milliers d'individus, c'est très réel aussi. »
Est-ce que des gens pourraient être choqués de cette manipulation de l'Histoire? « En fait, il ne change pas l'Histoire, il raconte une histoire. Pour moi, c'est beaucoup plus insultant que les soldats des camps allemands parlent anglais avec cet étrange accent « juif »; ça, c'est changer l'Histoire. »
Changez-vous votre manière de jouer parce que vous êtes aussi réalisateur? « Oui, mais sur le plateau de Quentin, il faut être là pour lui. Je le savais dès le départ, et j'aimais bien « être » le personnage. C'était bien aussi de redevenir réalisateur pour quelques jours pour tourner Nation's Pride, pour sortir ça de mon système, mais je voulais être le type d'acteur que moi, j'aimerais avoir sur mon plateau, c'est-à-dire toujours concentré. L'acteur doit se permettre d'être vulnérable. Il faut abandonner la vanité, la dignité, et penser à ce qui est le mieux pour le personnage. »
Croyez-vous que le casting est le plus important? « Oh oui! le casting est vraiment la chose la plus importante. Si on n'engage pas la bonne personne, on le sent immédiatement, peu importe le talent. En audition, lorsque la mauvaise personne lit ton scénario, tu te dis que ton script est mauvais. Quentin disait que s'il n'avait pas trouvé le bon acteur pour joué Hans Landa, il n'aurait pas fait le film. »
Mélanie Laurent
« C'est très nouveau pour moi, qui suis habituée à faire des petits films français qui sortent en France, de faire une sortie mondiale comme ça. »
On s'imagine aisément qu'avec un sujet aussi sérieux et de tels moyens, le tournage est très sérieux... « Non, on a beaucoup ri. C'était un tournage très joyeux. Très fatiguant parfois, mais tout le monde est tellement honoré de se retrouver sur ce plateau que tout est fait avec sérieux. C'était un peu fou et drôle, un peu à l'image du film. »
Quentin Tarantino, c'est déjà un personnage... « Je ne le connaissais pas personnellement, mais évidemment j'étais fan, comme beaucoup de gens de ma génération, surtout en France. Je n'ai pas été déçue du personnage! On a une image de lui, complètement fou, qui parle vite, qui s'enflamme... il est comme ça! Il est amoureux de ses acteurs, et il sait leur parler. »
Avez-vous une scène préférée vous impliquant? « Ma mort. J'ai fait 35 films et je n'étais jamais morte. J'appréhendais beaucoup et je trouve qu'il en a fait une scène graphique, sublime, très shakespearienne, de haine et de passion, et on s'entretue, et... »
« Je lu le scénario en anglais et j'ai passé les essais en anglais, mais j'ai joué en français. » Est-ce que vous avez ajusté la syntaxe de certains dialogues? « Ah non! Il ne voulait pas. Je l'aurais bien fait pourtant à certains moments. Il avait des mots qu'il préférait plus que d'autres... Quentin est très ouvert aux propositions, il me laissait souvent une ou deux prises pour moi avant de venir ajuster des choses, mais on ne change pas un mot. »
« C'est un réalisateur très pointu, très exigeant, qui sait exactement ce qu'il veut. Il vous laisse avec l'idée que c'est vous qui avez proposé une chose, mais finalement, c'est lui qui vous a emmené à tout ça. »
Quand on retrouve Shosanna, on ignore tout de son passé. Dans votre travail, vous intéressez-vous à ces détails? « Il voulait que je me fasse ma petite histoire. Mais il y a des scènes qui n'ont pas été mises au montage, dont les scènes qui expliquent comment j'en suis venue à m'occuper de ce cinéma, avec Maggie Cheung. Je crois qu'il aimait bien aussi l'idée que les gens se posent la question : « mais qu'est-ce qu'elle a fait Shosanna pendant quatre ans? » Moi je sais, mais... »