Tout juste après la présentation très attendue d’Eastern Promises à Toronto, et quelques heures avant de se rendre à New york, David Cronenberg a pris quelques heures de sont temps pour rencontrer les journalistes montréalais pour parler, brièvement, de son long métrage, attendu ce vendredi dans les salles québécoises. Il fait une nouvelle fois équipe avec Viggo Mortensen, après A History of Violence, dans un autre drame d’une extrême cruauté, qui gravite autour de la mafia russe londonnienne et d’un mystérieux chauffeur aux nombreux secrets.
Naomi Watts, Vincent Cassel, Armin Mueller-Stahl et Sinéad Cusack font également partie de la distribution.
David Cronenberg
Le réalisateur de 64 ans est entré dans la légende avec des films tels que Scanners, en 1981, Videodrome deux ans plus tard et eXistenZ, en 1999. Depuis, son film A History of Violence a reçu trois nominations aux Oscars. Mais est-il conscient d’être devenu un réalisateur culte? « Dans une certaine mesure, oui. Je suis allé au Comic-Con, et là-bas les amateurs sont très expressifs… Mais il n’y a pas que des avantages. Parfois, les amateurs ne voient qu’une certaine partie de ma carrière, par exemple les films d’horreur, et ils n’aiment pas ce nouveau film parce que ce n’est pas leur genre préféré. »
« Je n’aime pas pas décevoir mon public, mais je ne peux pas non plus être contrôlé par lui. Si je veux faire ce film, je ne peux pas me dire que les fans n’aimeront pas. »
« Je dois rappeler aux gens qu’ils ne doivent pas confondre leur processus avec le mien. Créativement parlant, ça ne m’aide pas du tout de parler des autres films que j’ai faits. Bien sûr, l’expérience que j’ai accumulée m’aide, mais chaque film est une chose vivante, unique et différente des autres. »
Une visite éclair à Montréal qui force le réalisateur canadien à enfiler les entrevues une après l’autre et sans temps mort. « C’est plus facile quand le film et bien reçu, mais on préférerait toujours prendre ce temps-là pour travailler sur un nouveau film, même si on aime le vieux film et qu’on veut l’aider à avoir une carrière. Mais j’aimerais mieux être entrain de faire un nouveau film. »
Est-ce que les deux plus récents films sont des accomplissements logiques de votre carrière? « Je pense, oui. Je dois dire que quand je choisis un film, je ne pense pas du tout à ma carrière. Je suis concentré sur ce film, j’en suis excité, je veux en apprendre plus sur ces criminels, je veux créer les personnages et trouver les acteurs. »
Que vous reste-t-il à apprendre sur un plateau de tournage? « C’est un média tellement complexe, toujours en plein changement. Les cinéastes sont les grenouilles, les amphibiens du monde technologique. Les grenouilles assimilent tout à travers leur peau, alors si l’air est pollué, elles deviennent polluées. Les cinéastes sont très sensibles aux changements dans l’économie globale, les changements culturels… Ce que je veux dire, c’est que ce n’est jamais ennuyant. Il y a toujours quelque chose à apprendre et à découvrir. »
Comment le projet Eastern Promises est-il né? « De la manière la plus commune possible : mon agent m’a envoyer le script. J’ai de bons agents qui savent ce qui m’intéresse et leur travail est d’être attentif à ce qui est disponible. Ce film était à la BBC Films pour un bon bout de temps… J’ai été très intéressé par le scénario, même s’il n’était pas prêt à être filmé. C’était parfait parce que pour le scénariste (Steven Knight, ndlr), c’était un premier jet, une version de travail. On a changé beaucoup de choses. »
Viggo Mortensen est cependant à nouveau l’acteur principal du film. « Avec Viggo, on n’a pas droit à un solo de violon, mais à tout l’orchestre. Il comprend tellement bien les éléments du cinéma, c’est un excellent collaborateur. Pendant qu’il travaille sur son personnage, il apporte de nouvelles informations que changent des choses dans le film. Par exemple, il a trouvé un livre sur les tatouages des criminels dans les prisons russes, qui existe depuis plus de cent ans. Il fallait incorporer cela au film. Viggo fait de votre film un meilleur film, pas seulement en étant l’excellent acteur qu’il est, ce qui est bien sûr sa plus grande qualité, mais aussi en influençant plusieurs autres aspects de la production. »
Êtes-vous un dictateur sur le plateau? « Non, je suis un collaborateur. C’est pour ça que les acteurs aiment travailler avec moi. Je ne leur donne pas beaucoup d’indications, mais je leur donne l’impression – qui est d’ailleurs vraie – qu’ils sont libres de faire des suggestions, de faire des choses ridicules. Je vais les regarder, je remarque tout et j’entends tout. Les acteurs se sentent regardés et que je vais leur dire : « oui, non, peut-être, fais autre chose. » Ils aiment ça. »
À l’affiche dès vendredi au Québec.