Cette année, nous soufflons les trente bougies du toujours très aimé Forrest Gump.
Pour l'occasion, le réalisateur Robert Zemeckis nous propose un nouveau long métrage conceptuel, Here (Ici, en version française), pour lequel il a pu réunir Tom Hanks et Robin Wright à l'écran.
Si Zemeckis a collaboré de nouveau avec chacun des deux interprètes au cours des trois dernières décennies, c'était la première fois que les trois principaux intéressés travaillaient tous ensemble sur le même plateau depuis le début des années 1990.
Et pourtant, indépendamment de la qualité du film, Here a droit à une sortie plutôt modeste, nous amenant à nous poser de nouveau la question à savoir si les noms apparaissant sur l'affiche d'un film peuvent encore être utilisés comme un outil promotionnel.
Récemment, la comédie d'action Wolfs, mettant en vedette Brad Pitt et George Clooney, a eu droit à une sortie on ne peut plus limitée sur grand écran, avant d'aboutir une semaine plus tard sur la plateforme Apple TV+.
En 2008, les retrouvailles de Leonardo DiCaprio et Kate Winslet dans Revolutionary Road n'avait pas non plus eu l'effet escompté sur le box-office mondial.
Même chose pour les plus récents films de Steven Spielberg qui, malgré d'excellentes critiques, se sont particulièrement cassés les dents aux guichets.
Évidemment, l'ère des stars de cinéma est depuis longtemps révolue, Tom Cruise étant identifié depuis des années comme le dernier acteur de l'Histoire qui jouira d'une aura aussi démesurée.
En termes de réalisateurs « profitables », Christopher Nolan, Quentin Tarantino et James Cameron (une fois tous les dix ans) sont pratiquement les seuls noms qui viennent en tête à présent.
La culture cinématographique « populaire » est plus que jamais une affaire de franchises, de propriétés intellectuelles et de film de la semaine sur Netflix, et moins en moins de « noms ». Le succès et l'impact d'une oeuvre se quantifient désormais en nombre de memes et de gifs qu'elle aura su engendrer sur les réseaux sociaux dans les semaines suivant sa sortie.
En date du 25 octobre, plus de 330 nouveaux films avaient déjà pris l'affiche en 2024 dans les cinémas de la Belle Province, sans compter les productions originales proposées toutes les semaines sur les plateformes numériques.
C'est beaucoup trop pour permettre à un film ou à un artiste d'occuper l'espace public et médiatique au-delà de la semaine de la sortie de son plus récent projet, et donc de bâtir quelque chose de plus solide sur le long terme. Surtout que la diffusion sur le câble, les clubs vidéo et la vente en formats physiques ne pèsent plus dans la balance. Et c'est loin d'être négligeable, et ce, même si le cinéma n'aura jamais été aussi accessible partout, en tout temps.
Terminée l'époque où tous les élèves parlaient du même film dans la cour d'école à la suite de sa diffusion sur une chaîne généraliste au cours de la fin de semaine.
Indépendamment de son budget, un long métrage était beaucoup plus en mesure de bâtir son public à court et à long terme dans un calendrier moins chargé, et ce, même si les chiffres n'étaient pas nécessairement spectaculaires aux guichets.
Alors que l'offre est de plus en plus morcelée et que la fréquentation des salles est en baisse depuis la fin de la pandémie, l'industrie devra se pencher plus tôt que tard sur le genre de culture qu'elle peut encore espérer développer autour du septième art, de sa diffusion et de ses artisans.
Déjà, « moins mais mieux » pourrait être une bonne première piste de réflexion...