Il n'y a que quatre films qui prennent l'affiche cette semaine, dont trois uniquement à Montréal. On peut d'ailleurs les nommer : Le Havre, Elmo: A Puppeteer's Journey, Atlas Shrugged: Part 1 et L'exercice de l'état, qui prend aussi l'affiche à Québec et à Sherbrooke. Sans rien enlever à ces films, à leur qualité ou à leur intérêt, on peut parler d'une semaine plutôt tranquille dans les salles de cinéma québécoises. Vrai que les cinéphiles iront voir ou revoir The Twilight Saga: Breaking Dawn - Part 1 ou se satisferont des Muppets ou de Hugo, qui ont pris l'affiche il y a dix jours. Aux États-Unis, ces films drainent déjà toute l'attention médiatique et il est vrai que de choisir sciemment de les affronter est une décision risquée pour un distributeur. Mais au Québec?
On constate que la place était libre, le 2 décembre, pour qu'un film - québécois probablement - soit la vedette du week-end. D'autant que cette année, on a encore vécu un automne extrêmement chargé en films québécois qui, sans jamais être pareils, abordaient parfois des sujets semblables ou sollicitaient le même public à quelques semaines (voire quelques jours) d'intervalle.
À commencer par La Run, qui a pris l'affiche le le 26 août. Ont suivi : Pour l'amour de Dieu, le 2 septembre, Coteau rouge le 9 septembre, Snow and Ashes le 16, Café de Flore le 23 septembre, Le bonheur des autres et French Immersion, le 7 octobre, Marécages le 14 octobre, Décharge le 21 octobre et Laurentie et Monsieur Lazhar, le même jour, soit le 28 octobre; pour n'en nommer que quelques-uns (que les films de fiction, en fait).
Ces films ne s'adressent évidemment pas tous au même public, certains sont plus pointus que d'autres, mais quand même, ils s'adressent tous à des spectateurs qui s'intéressent au cinéma québécois et qui ont appris à l'aimer. Difficile de dire exactement que représente ce public d'irréductibles, mais on peut les comprendre d'avoir été éreintés pendant ces quelques semaines. Ils ont sans doute dû faire des choix et certains de ces films n'ont peut-être pas rencontré leur public.
Depuis Le vendeur, paru le 11 novembre, aucun long métrage de fiction québécois n'a pris l'affiche, et aucun n'est prévu avant le 16 décembre. Un mois sans films québécois, alors que onze (sans compter les documentaires Trou Story, Surviving Progress et d'autres) ont pris l'affiche presque simultanément en l'espace de douze semaines. Comment l'expliquer?
Même Nuit #1, un film québécois d'Anne Émond qui bénéficie d'une rumeur favorable depuis sa présentation au Festival du nouveau cinéma en octobre dernier, prendra l'affiche le 16 décembre, alors que huit autres films sont aussi prévus ce jour-là (en plus de ceux qui prendront l'affiche le mercredi suivant). S'il avait pris l'affiche hier, le film aurait monopolisé l'attention de tous les médias québécois qui l'auraient sans doute traité comme le « film de la semaine », avec la visibilité - et les unes - qui l'accompagne. À travers Sherlock Holmes: A Game of Shadows, Mission: Impossible: Ghost Protocol, Alvin and the Chipmunks: Chipwrecked et le magasinage des Fêtes qui sera plus pressant encore, le film risque de passer inaperçu.
Il est vrai qu'en repoussant la sortie d'une ou deux semaines, on veut miser sur les vacances scolaires et les congés fériés pour attirer les gens en vacances dans les salles. Quoi de mieux qu'un bon film en famille le lendemain de Noël? Probable aussi qu'avec toutes les sorties de la semaine dernière du Thanksgiving aux États-Unis, toutes les salles sont monopolisées et que peu sont disponibles pour des nouveautés. Mais, encore une fois, le véritable avantage pour un film québécois, s'il avait pris l'affiche ce week-end, aurait été de recevoir un traitement médiatique de blockbuster. L'opportunité est en quelque sorte gaspillée; et il ne fait aucun doute que cette lutte fraternelle que se sont livrés les films québécois cet automne ne profite à personne.