Un bon documentaire ne fait pas toujours une bonne fiction. C'est le cas notamment de Last Breath, une incroyable histoire vraie qui, sous la forme fictionnelle, peine à convaincre.
Sorti en 2019, le documentaire Last Beath racontait l'opération de sauvetage d'un plongeur coincé à des centaines de mètres sous l'eau. Chris Lemons devait réparer les câbles d'une installation située dans les profondeurs de la mer du Nord. Mais lorsque le cordon ombilical de sa combinaison se rompt, une course contre la mort s'effectue pour le secourir. Le long métrage signé par Richard da Costa et Alex Parkinson captivait aisément, s'inscrivant dans la lignée du modèle du genre Touching the Void de Kevin Macdonald.
Pourquoi alors en faire une fiction? Pour rejoindre plus de gens et se permettre davantage de liberté. Alex Parkinson se retrouve à nouveau aux commandes de ce récit qui débute... comme un documentaire! Après une introduction fleur bleue où notre héros (incarné par Finn Cole) dit au revoir à son amoureuse, le spectateur est immergé dans son travail. La caméra suit le protagoniste sur le bateau qui deviendra peut-être son tombeau, naviguant au sein des machines et des hommes - et quelques femmes - au pied marin. Une entrée en matière qui promet pour la suite des choses.
La première partie prend son temps pour nouer les relations qui s'établiront entre Chris et ses deux principaux collègues: l'expérimenté Duncan (Woody Harrelson) qui est à un doigt de la retraite et le ténébreux David (Simu Liu) qui passe son temps à s'entraîner. Un peu plus et on se croirait devant Apollo 13 de Ron Howard, autre film «catastrophe» à échelle humaine sur une mission qui tourne mal.
Sauf que dans Last Breath, les personnages n'existent jamais réellement: ils ne sont que des archétypes jusqu'à plus soif. Chris est le typique jeune homme charismatique que tout le monde aime, Duncan le farceur dévoué et David laisse ses muscles parler pour lui. Finn Cole (Dreamland) et Simu Liu (Shang-Chi and the Legend of the Ten Rings) n'ont presque rien à se mettre sous la dent et seul Woody Harrelson évite de boire la tasse, même si au niveau des rôles dramatiques et sérieux, il était nettement plus convaincant dans Rampart et Three Billboards Outside Ebbing Missouri.
Lorsque les scènes sous-marines apparaissent, le film vient bien près de se redéfinir. Il est tenté par l'action à la Gravity mais décide de se retenir. Explorer le genre horrifique - la peur du noir et de l'inconnu - aurait pu être intéressant, sauf qu'encore là, aucune tentative sérieuse n'est envisagée. Le scénario écrit à six mains ose plutôt la parabole religieuse avec cette lumière divine qui semble soulever (le) Chris(t) vers l'autre monde...
Étrangement, pendant ces minutes anxiogènes où notre pauvre nageur est coincé dans les abysses, le cinéphile ne ressent ni suspense ni sentiment d'urgence ou de claustrophobie. Son sort ne tient jamais réellement en haleine, ce qui pose évidemment problème.
Le cinéaste fait pourtant tout pour qu'on se soucie de Chris. Il manipule l'auditoire en utilisant une ellipse avec son amoureuse dans le but de soutirer quelques larmes. Il pose de la musique presque mur à mur du récit afin de créer artificiellement un rythme et de la tension. Ces excès ne viennent que surligner lourdement l'héroïsme en place.
Que vaut alors la fiction lorsque le documentaire existe déjà et qu'il s'avère de bonne facture? Pas grand-chose, si ce n'est de rappeler cette invraisemblable histoire vraie dont la conclusion n'a toujours pas été expliquée à ce jour. Bien que Last Breath traite de résilience avec un certain doigté, sa mise en scène purement fonctionnelle et la faible implication que l'on peut avoir envers ces individus plus grands que nature qui sont censés nous émouvoir sont autant d'occasions ratées qui auraient amené le film à bon port au lieu de le laisser à la dérive.