Dans 99 % des cas, les suites des films d'horreur sont inférieures au premier tome. Evil Dead 2, Scream 2 et Rec 2 se révèlent de rares exceptions. On peut maintenant rajouter Ouija: Origin of Evil à cette liste très sélecte. Comment une première aventure qui était un véritable navet peut se muter en un antépisode qui devient du coup l'un des meilleurs longs métrages américains à frissons de l'année?
Le scénario est évidemment une donnée importante. Celui concocté par Mike Flanagan et Jeff Howard est particulièrement efficace à défaut d'être très original. Le récit qui emprunte aux classiques du genre que sont The Exorcist, le Omen original, The Shining et même Interstellar (!) se paye une cure de jouvence en se tournant vers les années 60. C'est peut-être une décennie avant l'action où se déroule The Conjuring 2, mais le climat oppressant est presque le même. La recréation historique joue pour beaucoup et on a droit à une nouvelle visée féministe.
Depuis le décès de papa, maman (Elizabeth Reaser) tente du mieux qu'elle peut de subvenir aux besoins de ses deux filles (Annalise Basso et Lulu Wilson), jusqu'à devenir une fausse médium à temps partiel. Peut-être qu'acheter le jeu Ouija n'était pas une bonne idée en fin de compte...
Cette création se déroule sur deux niveaux différents et complémentaires à la fois. Il y a toute la joute psychologique, dramatique et mélancolique liée à cette disparition soudaine. Une façon d'étoffer les personnages et de se soucier vraiment de leur sort. Puis il y a les aspects horrifiques plus attendus et ces sursauts gratuits. Des moments qui fonctionnent convenablement et qui font amplement sourire, comme c'était le cas récemment dans Lights Out. L'histoire a beau s'intensifier inutilement et verser dans le n'importe quoi lors de la dernière ligne droite, elle possède un côté grotesque assez irrésistible. Surtout que contrairement au solide Don't Breathe, on a osé une finale plus sombre qui cumule avec une scène cachée dans le générique qui donne froid dans le dos et qui boucle la boucle avec le premier Ouija (à moins que ce soit un clin d'oeil à la trilogie Insidious, puisque l'actrice est la même).
Le scénario n'est évidemment pas tout et il doit y avoir un bon cinéaste pour élever la matière première. C'est là que Mike Flanagan entre en jeu. En voilà un qui n'a jamais déçu jusqu'à présent (du moins sur Absentia et Oculus, on attend toujours une date de sortie pour Before I Wake et Hush) et il possède un talent pour jouer des clichés et des effets-chocs en créant d'insoutenables instants d'angoisse. Sur Ouija: Origin of Evil, il va jusqu'à recréer un sentiment old school en ajoutant directement sur l'écran des "brûlures de cigarettes", ces mythiques indicateurs de changement de bobines qui n'existent plus depuis l'arrivée du numérique!
Il a également su s'entourer de bons comédiens. Elizabeth Reaser n'a jamais impressionné personne dans Twilight (elle incarnait la mère de Robert Pattinson) et elle est ici très satisfaisante. Tout comme Annalise Basso qui est sur une bonne lancée depuis Captain Fantastic. C'est toutefois la nouvelle venue Lulu Wilson qui demeure la plus démentielle, ressemblant à une jeune Linda Blair. Et quelle surprise de retrouver Henry Thomas, l'inoubliable Elliott de E.T., en membre du clergé qui se frotte à des forces occultes!
Il est tout à fait normal de douter de Ouija: Origin of Evil après le médiocre premier volet. Cette seconde tentative s'avère largement supérieure et elle risque de donner naissance à de nombreuses suites. Peut-être que celles-ci trouveront un moyen d'être vraiment inédites et qu'elles transcenderont cet effort, au demeurant très divertissant.