Les espions n'ont jamais été aussi présents au cinéma. Soit ils se déclinent sur un mode sérieux comme James Bond, Mission: Impossible et Jason Bourne... ou ils lorgnent vers la satire, la parodie ou la franche comédie. Dans cette dernière optique, pour un OSS 117 ou un Spy qui font rire encore et encore, combien y a-t-il de déceptions? Seulement en 2016, on peut compter The Brothers Grimsby, Central Intelligence et maintenant Keeping Up with the Joneses.
Cette récente farce possède pourtant une prémisse rigolote. Un couple tranquille et sans histoire (Zach Galifianakis et Isla Fisher) soupçonne ses nouveaux voisins trop parfaits (Jon Hamm et Gal Gadot) de mentir sur leurs activités. Et s'ils étaient des agents secrets?
Le potentiel est vite dispersé au sein d'un récit trop long et prévisible, où les quelques rares gags réussis (la visite d'un restaurant pas comme les autres apparaît comme un sommet) côtoient les farces ratées et celles carrément racistes. Sentant la recette éprouvée, le récit fait du surplace et ce n'est pas en rajoutant de pénibles scènes d'action que l'on change le mal de place. Le scénario mécanique qui emprunte autant à True Lies qu'à Mr. & Mrs. Smith et Neighbors ne comporte aucune densité et il est trop souvent affublé de dialogues mièvres et d'allusions sexuelles rudimentaires. Doit-on se surprendre de retrouver à l'écriture Michael LeSieur, l'homme derrière les si peu mémorables The Maiden Heist et You, Me and Dupree?
Ce qui est plus triste est de remarquer la présence de Greg Mottola derrière la caméra. Le cinéaste a toujours eu la main heureuse avec Superbad, Adventureland et Paul. C'était avant qu'il s'essaye au téléfilm et qu'il se casse les dents sur Clear History. Loin de s'améliorer, sa confiance en lui est clairement affectée et il a conservé le style télévisuel. Keeping Up with the Joneses ressemble beaucoup à un sitcom de deuxième ordre avec sa réalisation impersonnelle et son humour inoffensif. Le rythme y est et c'est pratiquement tout.
Comme c'est trop souvent le cas, on demande à de très bons acteurs de faire oublier leurs personnages unidimensionnels. Zach Galifianakis n'est pas plus convaincant que dans le récent et désolant Masterminds, irritant la plupart du temps. Isla Fisher s'en sort mieux même si à peu près n'importe qui aurait pu incarner son rôle. Les sourires proviennent plutôt de Jon Hamm et de Gal Gadot. Le premier est parfait en Hugh Jackman des pauvres, étant beaucoup plus à l'aise en mode léger que dramatique. La seconde joue avec jubilation de son image de femme fatale (on dirait parfois une jeune Angelina Jolie), affichant un réel talent pour la réplique bien placée qui faisait terriblement défaut dans Batman v Superman, Triple 9 et Criminal.
Ce n'est cependant pas suffisant pour recommander cette création qui devait prendre l'affiche en avril dernier. Sans être exécrable, Keeping Up with the Joneses s'apparente à une production de bas étage, trop peu cocasse et terriblement banale. Le type d'effort routinier qui se termine rapidement dans un cul-de-sac et qui finit par s'enliser malgré sa distribution plus qu'enviable. Il faut souvent plus que des comédiens chevronnés pour faire du cinéma, même celui qualifié de divertissement.