Ce n'était qu'une question de temps avant que Bridget Jones retourne au cinéma. La nostalgie est un fond de commerce inépuisable, son public l'attend avec impatience depuis belle lurette et il ne risque pas d'être déçu. Pour les autres...
Cette fois notre célibataire préférée (qui est toujours interprétée par Renée Zellweger) vient de célébrer son 43e anniversaire avec une belle surprise : elle est enceinte! De qui? De son cher Monsieur Darcy (Colin Firth)... ou encore d'un séduisant inconnu (Patrick Dempsey). Et si les trois décidaient d'élever cet enfant!?
Faire revivre ce personnage culte 12 années après le pénible Bridget Jones: The Edge of Reason avec une intrigue aussi éculée dépasse l'entendement. On sent d'ailleurs que les scénaristes se sont déchirés tant le long métrage passe constamment de la pétillante comédie de situations à la farce grasse, des calembours savoureux à ceux embarrassants qui sont de nature sexuelle. Entre Emma Thompson qui a généralement bon goût et Dan Mazer qui vient de signer l'exécrable Dirty Grandpa, il est facile de tirer des conclusions. Surtout que le mélange entre rires et drames (ou profondeur) est rarement au point. On est très loin, dans un registre similaire, du délicieux Saint Amour, qui ne se sentait pas obligé de répéter les mêmes clichés sur ce "coeur qui peut aimer des êtres différents de soi". Trois films pour en arriver là...
Dans l'espoir de ne pas trop saboter les souvenirs du passé, on a ramené Sharon Maguire derrière la caméra, elle qui avait signé Bridget Jone's Diary en 2001. Un choix discutable puisque sa mise en scène rappelle beaucoup trop les impératifs de la télévision. Ceux qui font mal aux yeux tant la réalisation manque de finesse. Peut-être aurait-elle dû s'inspirer de The Snapper, ce téléfilm grinçant de Stephen Frears sur une femme qui ignorait également l'identité de son enfant à venir. La cinéaste ne sait d'ailleurs pas comment camoufler ces situations qui ressemblent beaucoup à celles des précédents tomes, sabotant complètement cette première demi-heure qui prend une éternité à lever. D'une durée de plus de deux heures, il ne faut pas se surprendre d'y trouver de sévères longueurs et répétitions.
La consistance cinématographique n'a jamais été la tasse de thé de cette série. Ni la prose des livres d'Helen Fielding qui emprunte au Pride and Prejudice de Jane Austen sans avoir la plume affûtée d'un Whit Stillman (qui, incidemment, s'est déjà attaqué avec beaucoup plus de succès à cette immense auteure britannique sur son hilarant Love & Friendship). Ce sont les personnages qui sont importants et la plupart s'avèrent sympathiques. La distribution secondaire fait largement sourire, que ce soit ces parents coincés et cette amie attachante. C'est un véritable plaisir de voir Colin Firth renouer avec ses anciennes amours. La plupart de ses scènes avec Bridget Jones sont d'ailleurs des joyaux comiques. Beaucoup moins à l'aise est Patrick Dempsey qui se croit toujours dans Grey's Anatomy. Il essaie tellement de copier le jeu de Hugh Grant (qui s'est retiré du projet à cause de la valeur du scénario) que cela en devient gênant. Et Renée Zellweger dans tout ça? L'actrice que l'on n'a pas vue depuis l'ennuyant My Own Love Song en 2010 a peut-être changé physiquement, mais elle conserve néanmoins la fougue de l'emploi.
Il faut être un fan pour apprécier Bridget Jones's Baby. Là où il y a moult défauts techniques et scénaristiques, ses admirateurs ne retiendront que la fraîcheur de l'interprétation et quelques numéros qui font rire. Ce n'était sans doute pas suffisant pour justifier un troisième film, mais puisqu'il est là, il s'est fait bien pire en tant que divertissement futile et oubliable.