Le magasin des suicides, du réalisateur français Patrice Leconte, prend l'affiche au Québec ce vendredi. Le film prend d'ailleurs simultanément l'affiche en France, après avoir été présenté au Festival de Toronto plus tôt cette année. Patrice Leconte, réalisateur des films Les bronzés et Ridicule, dirige un premier film d'animation qui est aussi une comédie musicale abordant de front la thématique du suicide. En effet, le film raconte l'histoire de la Maison Tuvache, un magasin qui vend les outils nécessaires pour réussir son suicide...
Un premier film d'animation qui permet beaucoup de liberté. « Oui! Même s'il n'y a pas de caméra, il y a des mouvements de caméra... D'un seul coup, je profitais d'une liberté absolue au niveau de la mise en scène. Vous dites : on va suivre un parfum de crêpe le long de l'escalier, qui va glisser sous la porte et qui va finir dans les narines de Mishima qui va se réveiller en sursaut... en animation on peut! On peut le faire! »
« J'ai eu pendant toute l'élaboration du stroyboard du film une liberté folle! Ça va être très dur de revenir au cinéma normal. »
« À toutes les étapes successives : storyboard, animatiques, animatiques avec un petit peu de son, puis on met les voix, jusqu'à résultat final; le film ne ressemble au film final, qu'au final. C'est quand tout est fini qu'on voit quelle allure ça a. Quand j'ai vu l'animatique, qui est une sorte de brouillon en temps réel avec les voix qui sont placées, qui bouge un peu, j'étais anéanti. Il manquait de tout. »
Vous avez donc dirigé des comédiens en studio. « On croit souvent que les voix s'enregistrent après, comme quand on fait une post-synchronisation de film, un doublage. Or, quand il s'agit de créer un film d'animation, on enregistre les voix avant toute chose, parce que l'animation va se caler sur les voix. C'est à moi de savoir ce que je veux obtenir, de faire jouer les comédiens qui sont debout dans un studio, devant un micro. »
Évidemment, vu son sujet, il faut déterminer dès le départ à qui s'adresse le film. « Ma réponse va vous paraître un peu bizarre, mais... Tous les films que j'ai faits, donc vraiment tous, incluant celui-là, au départ je les fais pour moi, nous dit d'abord le réalisateur. Je ne perds jamais de vue le fait qu'un jour ou l'autre il y aura des spectateurs dans les salles et c'est à ces gens-là qu'il faut que le film plaise. Mais au départ, il faut que ça me plaise à moi, si je veux que le film soit conforme à mes désirs, ma sincérité, à ce que j'ai envie d'exprimer. »
L'introduction du film, particulièrement tragique, montre plusieurs gens désespérés qui souhaitent mettre fin à leurs jours. « En abordant ce film-là, je ne me suis jamais demandé à quel public, à quelle tranche d'âge je m'adressais. On se pose la question parce que c'est un film d'animation et que les films d'animation, par définition ou par habitude, s'adressent à des publics très jeunes. J'ai fait des projections, des avant-premières, avec des enfants qui ont le même âge que le petit Alan, donc 8 ou 9 ans, et les enfants en question, ils comprennent tout, ils rient... Les enfants, ça ne les angoisse pas du tout, ça les fait rire. Ils sont même plus décontractés que les adultes sur ces sujets-là. En plus, ils peuvent s'identifier au personnage, qui lui trouve que le monde est trop triste et que les adultes sont trop sérieux. » Notons cependant que le film a été classé « 13 ans et + / Violence » par la Régie du cinéma, ce qui signifie que les enfants de moins de 13 ans doivent être accompagnés d'un adulte pour voir le film.
« Comme l'animation, c'est comme la vie mais c'est pas la vraie vie, ça permet de grossir le trait, d'exagérer les choses. Le monde présenté dans ce film, c'est le même monde que le nôtre, mais en pire. D'où l'exagération du dessin. C'est une extrapolation provisoirement pessimiste, du monde dans lequel nous vivions. »
Le magasin des suicides est distribué par Les Films Séville.