Luc Besson joue dans les plates-bandes de Star Wars et Avatar avec Valerian and the City of a Thousand Planets, une oeuvre survoltée d'une ambition démesurée qui se regarde comme un gigantesque trip hallucinogène.
Le mystère entourant Luc Besson est peut-être finalement résolu. Comment un cinéaste qui a enfilé les films de qualité (Le dernier combat, Le grand bleu, Le professionnel) s'est mis à réaliser n'importe quoi dans les deux dernières décennies tout en produisant une quantité incommensurable de navets qui ont fracassé le box-office? Pour se faire un maximum d'argent, justement, afin de financer sans l'aide de studios américains Valerian and the City of a Thousand Planets, le long métrage le plus coûteux jamais produit en Europe. 180 millions d'euros qui lui permettent d'exaucer son rêve d'enfant.
Cette création est justement celle d'un homme prisonnier dans un corps d'adolescent qui se laisse porter par ses lubies et ses fantasmes. Monstres, planètes, action, confrontations : tout y passe sans réel temps mort. De quoi rendre jaloux les Guardians of the Galaxy de ce monde qui ne ressemblent à côté qu'à un épisode des Muppets. Parce qu'on parle ici d'un cinéma excessif et boulimique qui regorge de couleurs et de musique, où le mouvement en met plein la vue et exploite souvent parfaitement la technologie 3D. Il faut s'accrocher pour ne pas être largué par tous ces détails incroyables qui défilent à l'écran. Une course folle à travers les murs se déroule pratiquement sur fond d'acide alors qu'il y a suffisamment d'informations pour remplir huit suites.
Évidemment le voyage est principalement sensoriel et l'histoire n'a pratiquement aucun intérêt. Le scénario de cet opéra intergalactique rappelle énormément Star Wars (ironiquement, la bande dessinée culte est née bien avant) et le discours d'une naïveté affligeante sur la non-violence, l'écologie, l'immigration et l'amour salvateur est propre à Besson. Il s'agit parfois d'une variation sur son excellent et beaucoup plus abouti The Fifth Element, avec le même humour débonnaire et une finale bien similaire. Difficile pourtant de ne pas hurler de rire devant la banalité des dialogues, cette façon de montrer ce qu'un individu vient tout juste de dire et cette introduction cucul la praline sur un classique de David Bowie.
La qualité des personnages est aussi inégale que le reste de cette fresque. Impossible d'apprécier le Valérian campé par Dane DeHaan (Xavier Dolan prête sa voix dans la version française). Si on lui préfère nettement Laureline et son interprète Cara Delevingne, ce sont tous les humains qui souffrent des pires clichés possibles et inimaginables. Eh oui, que ce soient Clive Owen ou Ethan Hawke qui semble beaucoup s'amuser. Dans un monde idéal, il n'y aurait que des créatures et des entités venues d'ailleurs. C'est ce qu'il y a de mieux, comme ce trio de faux Yoda capitalistes, la méduse qui fait exister la seule et unique scène d'émotion du récit et ce dragon trop mignon qui permet le savoureux clin d'oeil au chef-d'oeuvre Quai des brunes de Marcel Carné. La palme revient à Rihanna qui incarne une « chose » qui se métamorphose constamment. Ce qu'on aimerait voir son film en solo!
Fascinant et irritant tout à la fois, Valerian and the City of a Thousand Planets est un de ces ovnis malades et complètement cinglés qui ne manque pas de charme. On ne peut qu'encourager ce cinéma à grand budget qui ose et qui prend des risques à une époque aseptisée dominée par les suites et les remakes. Seulement pour ça, on espère que Luc Besson n'y laissera pas sa chemine, sa carrière et sa compagnie de production.