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Double peine/peine.
Après un premier essai derrière la caméra passé plutôt inaperçu, « Quand tu auras fini de sauver le monde », où il était parvenu à enrôler la grande Julianne Moore, le comédien Jesse Eisenberg revient avec un second film qui a fait parler de lui dans les festivals et qui semble promis à une belle carrière. Lors de la saison des récompenses en tout cas. On le connaît surtout pour ses prestations de jeune geek anxieux et bourré de tocs dans lesquelles il excelle (et qu’il rejoue d’ailleurs ici avec brio mais sans surprise) mais c’est aussi la révélation du chef-d’œuvre « The Social Network » et le Lex Luthor du moribond DCEU de Warner. Avec « A real pain », c’est à un long-métrage à priori anodin et léger qu’il nous convie de prime abord à base de road-trip en Pologne entre cousins. Sauf que, sur bien des aspects (l’Holocauste en décor, la dépression et le mal-être en fond, ...), c’est parfois bien plus sérieux et sombre qu’on ne l’aurait cru. Mais aussi profond, superbement écrit et bourré de nuances sur tous les plans.
Le film est basé entièrement sur le voyage de ces deux cousins à la quête de leurs origines juives puisqu’ils vont aller sur les traces de leur grand-mère qui a quitté la Pologne et émigré aux États-Unis pour fuir le nazisme. Au sein de ce périple organisé en groupe, ils vont donc aller de ville en ville polonaise en passant par un camp de concentration et la maison d’enfance de leur mamie. Sans jamais verser dans le documentaire ou la tragédie sur les horreurs perpétrées sur le peuple juif, « A real pain » (titre à double niveau de lecture donc) n’en demeure pas moins une œuvre qui encourage le devoir de mémoire. Et les quelques séquences dans le camp de concentration sont d’une pudeur admirable et d’une puissance émotionnelle indéniable. La force du film est de, malgré tout, savoir rester léger la plupart du temps après ces moments douloureux de l’Histoire ou de l’histoire. Puisqu’au détour d’une scène poignante (celle du restaurant), on comprend toute la détresse émotionnelle et la peine de ces deux cousins tout autant que l’intensité de leur relation.
Petit à petit, par le biais de quelques dialogues, de réactions des personnages ou encore d’intonations et de regards, on s’approprie et on découvre le lien fort qui unit ces deux cousins. La manière dont ils interagissent avec le groupe est parfois amusante et le long-métrage recèle quelques moments caustiques mais c’est davantage une certaine mélancolie qui prend le dessus. Le personnage écrit par Eisenberg pour Kieran Culkin est riche et sublime. Un petit bijou d’écriture et le comédien le rend bien à son réalisateur en livrant une performance magnifique, pleine de nuances mêlant douleur, souffrance et joie de vivre. Et parfois tout cela en même temps. Une composition d’un électron libre malheureux parce que sensible qui confine au sublime (voir le dernier plan) et pourrait le mener aux Oscars. En outre, Eisenberg soigne ses images (de plans de coupes parfaitement choisis qui donnent envie de visiter la Polonge en cadrages esthétiques et adéquats) et il développe un bon sens du rythme. Cette chronique plus amère que douce est un petit plaisir d’à peine une heure et demie qui révèle un cinéaste doué aussi bien dans l’écriture que dans la mise en scène.
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