Connu pour ses films d'époque comme Cyrano de Bergerac, Indochine et Le bossu, Vincent Perez mène depuis plus de 20 ans une carrière de cinéaste. Avec Une affaire d'honneur, il signe sa réalisation la plus intéressante à ce jour.
Les duels sont en vogue à Paris à la fin du XIXe siècle. Surtout avec un colonel (Vincent Perez) qui a la mèche facile. Un maître d'armes (Roschdy Zem) est mêlé à cette folie et il n'a aucun autre choix que de prendre les armes pour s'en sortir vivant.
Comme dans le superbe The Duellists de Ridley Scott, qui demeure la référence en la matière, Une affaire d'honneur montre le duel dans son absurdité la plus totale. On y recourt pour un tout et pour un rien, rappelant cette violence qui est prête à exploser à chaque instant. Elle naît dans le coeur des hommes et le long métrage se permet d'explorer la masculinité de ses sujets, la virilité mal placée de ces êtres qui se font constamment la guerre.
Le scénario de Perez et de sa compagne Karine Silla dresse également un fascinant parallèle entre l'ancien et le nouveau monde, créant des métaphores probantes entre celui d'hier et d'aujourd'hui. Le personnage du colonel appartient au passé. Il s'est sacrifié pour son pays et perd la tête en découvrant que presque personne - et surtout pas la jeunesse - le respecte. Au contraire, celui du maître d'armes personnifie le changement à une époque machiste. Non seulement il hésite avant de faire couler le sang, mais il se laisse guider par son code d'honneur.
Déjà d'une belle modernité, le script prêche par excès en laissant autant de place à Marie-Rose Astié de Valsayre (Doria Tillier). Cette militante féministe doit absolument être redécouverte et elle mérite d'ailleurs un film à son effigie. Mais dans le contexte actuel, son personnage est mal intégré à l'intrigue, n'étant parfois là que pour aller chercher un public féminin en titillant une romance inutile et peu crédible.
Visuellement impeccable dans sa recréation d'époque même si la sobriété est à l'honneur, la mise en scène ne manque pas de souffle épique. Les scènes d'action sont menées de main de maître, et le rythme demeure à l'avenant. Il faut noter également l'élégant jeu d'ombres sur les textures.
La distribution, soignée jusque dans ses rôles secondaires (Damien Bonnard, Guillaume Gallienne), est dominée par Roschdy Zem, qui a connu une dernière année formidable avec L'innocent, Les enfants des autres et Les miens. L'acteur, que l'on découvre dans la pénombre, en proie au doute, est si subtil et puissant qu'il finit par éclipser ses partenaires de jeu Doria Tillier et Vincent Perez, qui s'avèrent beaucoup plus monolithiques.
Mélangeant drame, action et réflexion, Une affaire d'honneur sacrifie la profondeur au profit de l'efficacité. Si l'ensemble ne manque pas de divertir, il devient malheureusement redondant et même conventionnel. Le récit aurait gagné à être resserré, pas tant au niveau de la durée que celui des thèmes abordés. Sauf qu'après ses tièdes Alone in Berlin et The Secret, il s'agit d'un retour en force pour Vincent Perez derrière la caméra. Qui sait, à force de tourner, où il se rendra?