Des quelque 300 longs métrages produits annuellement en France, il arrive que l'un d'eux, loi des probabilités oblige, se transforme en immense succès populaire sans qu'on sache trop pourquoi. Des comédies surtout, Bienvenue chez les Ch'tis, en 2008, par exemple, et Intouchables, quatre ans plus tard.
Un p'tit truc en plus est bien parti pour obtenir lui aussi le sacre populaire. Depuis sa sortie dans l'Hexagone, le 1er mai, ce petit film sans prétention, mais bancal à plusieurs égards, navigue vers le cap des cinq millions de spectateurs, laissant dans son sillage le deuxième épisode de Dune.
À l'instar de Bienvenue chez les Ch'tis, mettant en vedette Dany Boon, et d'Intouchables, avec Omar Sy, Un p'tit truc de plus peut compter sur une locomotive nommée Artus, peu connu de ce côté-ci de l'Atlantique, mais vedette en France, pour séduire le public. En plus de signer la réalisation et le scénario, une première pour lui, l'humoriste s'est donné le rôle principal, celui de Sylvain, petit malfrat sans envergure qui, avec son père sans vergogne (Clovis Cornillac), trouve refuge dans une colonie de vacances pour adultes handicapés. Il s'agit de la solution improvisée que le duo a trouvé afin d'échapper aux policiers après le cambriolage d'une bijouterie.
Au beau milieu de cette joyeuse bande atypique, dont chaque membre possède « un p'tit quelque chose en plus », Sylvain devra feindre un retard mental pour ne pas attirer l'attention, sous le regard de son paternel devenu contre toute attente son éducateur. Un subterfuge démasqué par quelques pensionnaires, plus malins qu'ils en ont l'air.
À l'heure où les thèmes de l'inclusion et du droit à la différence s'invitent dans le discours public, Artus a su respirer l'air du temps pour construire une comédie ayant le mérite de faire jouer devant sa caméra une douzaine de personnes handicapées dans la vie réelle. Le procédé est rarissime, dans la mesure où il a surtout été utilisé dans le drame (Le huitième jour, avec Daniel Auteuil, ou Gabrielle, de Louise Archambault).
Chacun des personnages offre sa particularité : l'un ne cesse de prononcer de gros mots, l'autre voue un culte à Dalida, un troisième aime enfiler des déguisements bizarroïdes. Il y a aussi le truculent Stanislas Carmont, autiste porteur d'une voix élégante, découvert dans l'émission Les Rencontres du Papotin, sur France 2, où des personnalités sont interviewés par des journalistes neuro-atypiques.
Au-delà de l'idée de départ originale, Un p'tit truc en plus, aussi empreint de bienveillance soit-il, est loin de remplir ses promesses. Les intrigues sont cousues de fil blanc et laissent bien peu de place à la surprise. À titre d'exemple, on voit venir des kilomètres à la ronde que le béguin de Sylvain pour la belle éducatrice (Alice Belaïdi) finira de belle façon. Tout comme les pensionnaires ne se contenteront pas longtemps de l'infecte nourriture servie à chaque repas.
Au plan de la réalisation, Artus ne pèche pas par un excès d'originalité. Tout est formaté pour plaire au plus grand nombre, au fil de quelques saynètes musicales où Sylvain et son père développent contre toute attente un attachement à l'égard de leurs nouveaux amis. Le dénouement est à l'avenant : dégoulinant de bons sentiments, mélodramatique au possible et conçu pour vous arracher les larmes.
En bout de ligne, on retient d'Un p'tit truc en plus ses qualités de bienveillance et d'authenticité, des ingrédients qui expliquent sa cote d'amour chez un public qui semble en avoir bien besoin en ces temps troubles.