Pour son troisième long métrage à titre de réalisateur, Franck Dubosc a choisi d'arpenter le terrain de la comédie noire à saveur rurale à la manière des frères Coen. Plus précisément, Un ours dans le Jura joue allègrement dans les plates-bandes d'un certain Fargo.
Malgré tous les a priori que nous pouvions avoir, l'expérience se révèle étonnamment concluante.
Dubosc et sa coscénariste Sarah Kaminsky ne perdent d'ailleurs pas de temps avant d'empiler les cadavres. Un homme guidant un groupe de migrants à l'estomac bien rempli à travers les bois chute d'une falaise, puis une femme est heurtée accidentellement par une voiture, puis son complice finit empalé sur une branche d'arbre. Le tout en à peine quelques minutes.
Au milieu de tout ce bordel, nous retrouvons l'agriculteur Michel (Dubosc), dont le pickup a accidentellement heurté la voiture garée au bord de la route qui, à son tour, a heurté la femme mentionnée ci-haut après une manoeuvre effectuée pour éviter un ours qui se trouvait au milieu de la route.
Lorsque Michel mentionne l'incident à sa femme Cathy (Laure Calamy) à l'heure du repas, celle-ci est bien motivée à effacer toutes traces qui pourraient permettre aux autorités de remonter jusqu'à sa douce moitié. Son plan de match gagne toutefois rapidement en intensité après la découverte d'une arme à feu et d'un sac contenant deux millions d'euros à l'arrière de la bagnole accidentée.
Il revient ensuite au gendarme Roland Bodin (Benoît Poelvoorde) de tenter de démêler cette sinueuse affaire - appelée à se complexifier encore davantage -, à peine quelques jours avant Noël. Les morts n'ont pas fini de s'accumuler dans cette région comptant pourtant moins de mille habitants.
Dès le départ, Un ours dans le Jura fait preuve d'une compréhension pour le moins réjouissante du fil séparant la candeur de la stupidité. Et Franck Dubosc et ses acolytes marchent sur cette fine ligne jusqu'à la toute fin, nous présentant des personnages qui ne sont pas nécessairement les plus dégourdis, mais dont les bulles au cerveau traduisent davantage un inconfort par rapport à la situation dans laquelle ils tentent tant bien que mal de manoeuvrer.
Accordant une attention particulière au rythme de chaque séquence clé, le comédien et cinéaste évite habilement les cabotinages, misant plutôt sur une quantité non négligeables de répliques savoureuses et bien livrées, ainsi qu'une panoplie d'idées comiques crues, irrévérencieuses et/ou flirtant avec l'absurde.
Aux côtés d'un Franck Dubosc plus réservé, Benoît Poelvoorde et Laure Calamy volent la vedette. Le premier livre une performance comique aussi précise qu'enjouée, tandis que la seconde s'amuse tout autant dans la peau d'une mère et épouse qui n'a jamais peur de se salir les mains.
Si Un ours dans le Jura convainc moins en ce qui a trait au développement d'enjeux plus dramatiques, notamment lorsqu'il est question du couple et de la famille des deux principaux personnages, ceux-ci contribuent tout de même à ajouter un peu plus de chair autour de l'os.
La deuxième moitié du film aurait d'ailleurs pu être facilement raccourcie d'une dizaine de minutes pour être aussi efficace et bien rythmée que la première.
Un ours dans le Jura est donc une comédie exécutée sans prétention, affichant une connaissance suffisamment aiguisée des mécaniques du genre, et qui atteint la cible plus souvent que nous aurions pu le croire d'emblée.