Un balcon sur la mer adhère entièrement à son « romantisme magnifié » tirant sur le mélo, c'est-à-dire qu'il se laisse aller sans embarras à ce concept de Grand Amour perdu, en fait égaré dans le temps, qu'on retrouve par hasard une fois adulte. Le cinéma permet ce type d'exagération des sentiments (donc des émotions) de par son état compressé (deux heures pour raconter trois mois). Mais ici, le traitement est légèrement différent, puisqu'il est couplé à une sorte de mensonge, de mystère et d'enquête quasi-hitchcockienne... qui s'intègre bien maladroitement à la trame principale.
Même si une partie du film se déroule en Algérie, Un balcon sur la mer ne se consacre pas à la politique et préfère demeurer dans l'entourage de son couple central et dans le présent. Les flash-backs, souvent fort bien amenés par ailleurs, permettent de voir la vie en Algérie à travers le quotidien des enfants, mais à si petite dose qu'on ne sent jamais la nécessité de cet ajout dramatique; ça aurait pu être un autre pays, ça aurait pu être un bête accident plutôt qu'un attentat, rien n'aurait vraiment changé à l'impact émotif. C'est tout le contraire d'Incendies, par exemple, où l'aspect historique avait une véritable influence sur la trame narrative.
C'est pour cette raison que plusieurs parties du film, entres autres les longs moments d'introduction, semblent après coup totalement inutiles puisqu'on n'aura ressenti ni passion, ni tension, ni drame, ni rien. Ce sont donc de longs moments qui auraient dû être émouvants ou prenants qui sont au final longs, tout simplement. Et si on y ajoute l'enquête financière, on a un film qui est trop complexe pour rien, passe d'un genre à l'autre avec la même intensité mais sans la même efficacité. À son apogée, le film est donc aussi fade qui ne l'est tout du long, et la finale rate son objectif d'ampleur, de grandeur des émotions proposées.
Si Jean Dujardin démontre une nouvelle fois qu'il est possiblement l'acteur français le plus universel de sa génération, il en est différemment du reste de la distribution, assez flasque, qui l'entoure. Sandrine Kiberlain est une potiche interchangeable, Toni Servillo et Michel Aumont semblent s'ennuyer, et Marie-Josée Croze en femme fatale, rien n'y fait, on n'y croit pas. Le blond lui va très mal, d'abord, et disons qu'elle manque de naturel dans une logique de séduction et de soumission à la fois.
Un balcon sur la mer est donc ce qu'on pourrait appeler un film incomplet, ou inachevé, qui ne parvient pas à maîtriser toutes ses thématiques disparates et dont le mélange s'avère moins efficace que la somme de ses parties. On trouve plus de qualités à décortiquer qu'à voir l'ensemble et, on s'en doute, ce n'est pas l'objectif du cinéma.