Brad Pitt s'amuse beaucoup dans Bullet Train, un film d'action complètement cinglé qui finit toutefois par dérayer avant la fin.
Il ne s'agit pas d'un remake du long métrage nippon du même nom de 1975 (celui mettant en vedette Sonny Chiba et qui a inspiré Speed), mais d'une adaptation d'un roman signé Kötarö Isaka. Dans un train à grande vitesse qui file vers Kyoto, plusieurs assassins - presque tous blancs: la production risque de se faire taxer de « whitewashing » comme ce fut le cas des transpositions américaines de Ghost in the Shell et de Death Note - se disputent le contenu d'une valise.
Une histoire simple qui se voit inutilement complexifiée par l'apparition d'une horde de personnages, d'incessantes ellipses vers le passé, de sous intrigues peu intéressantes, etc. La première partie ressemble parfois à un ersatz de ce que Guy Ritchie faisait à ses débuts (à l'époque de Snatch), présentant ses antihéros paumés en leur faisant déblatérer une multitude de dialogues. Cela tente d'être culte comme dans les écrits d'Elmore Leonard... et cela n'y arrive que rarement. À l'image des désespérantes tentatives comiques qui tombent souvent à plat.
Cela n'empêche pas Brad Pitt de nager comme un poisson dans l'eau et d'être presque aussi décontracté que dans Once Upon a Time in Hollywood. Il est si magnétique qu'on aurait voulu le voir davantage à l'écran. Au lieu de cela, on lui préfère plein d'antagonistes aux destins tragiques ou hilarants et quelques cameos séduisants. Au sein de la riche distribution pas toujours bien exploitée, Brian Tyree Henry (Eternals) sort aisément du lot.
Évidemment, Bullet Train suscite principalement l'intérêt pour la qualité de ses scènes d'action et de ce côté, le résultat ne déçoit pas. Sans doute que le cinéaste David Leitch (Fast & Furious Presents: Hobbs & Shaw, Atomic Blonde) abuse des effets spéciaux trop évidents et qu'il cherche à reproduire le modèle de son Deadpool 2 en mélangeant violence gratuite et humour noir, autodérision et ton méta bon enfant. L'ancien doubleur de Brad Pitt (sur des titres comme Fight Club, Troy et Mr. and Mrs. Smith) possède toutefois un sens inné pour les cascades et les chorégraphies, utilisant à bon escient le contexte japonais - le film a été tourné en studio : COVID oblige - même si on demeure loin des Kill Bill et autres Speed Racer. De quoi faire oublier momentanément la vacuité de l'entreprise.
La création a l'avantage de se bonifier au fil de l'aventure, embrassant une folie et une absurdité qui lui vont comme un gant. Les hommages aux mangas, aux jeux vidéo, aux classiques de Jackie Chan et aux oeuvres de samouraïs et de yakuzas abondent, rendant le récit de plus en plus imprévisible. Jusqu'au moment où rien ne peut l'arrêter... à l'image de ce train qui file à toute allure et qui devient presque aussi incontrôlable que celui du trépidant Runaway Train.
Beaucoup trop long et inégal, Bullet Train déçoit quelque peu à l'arrivée, le voyage étant constamment peuplé de hauts vertigineux et de bas qui tombent littéralement au neutre. Le long métrage ne possède peut-être pas le charme chaotique du démentiel Detective vs. Sleuths ou les scènes d'action décoiffantes de The Gray Man, mais il saura néanmoins distraire et égayer dans un été qui est encore dominé par les suites et les films de superhéros.