François Ozon cherche à faire oeuvre utile avec Tout s'est bien passé, offrant de beaux personnages complexes et nuancés à Sophie Marceau et André Dussollier.
Que faire lorsqu'un père malade (André Dussollier) demande à ses filles de l'aider à mourir? Est-ce un autre délire momentané de cette figure qui n'a trop souvent pensé qu'à son bon plaisir? Contre toute attente, la cadette (Sophie Marceau) est prête à lui porter assistance.
Après un détour nostalgique par l'entremise de son très réussi Été 85, François Ozon parle à nouveau des soubresauts de vie et de mort, cette fois en abordant un sujet plus adulte. Le souhait de faire évoluer les mentalités françaises est présent, même s'il campe son récit dans les interdits des années 90. Son véritable désir est toutefois de rendre hommage à Emmanuèle Bernheim, dont il adapte le livre autobiographique. Une romancière qui a, par le passé, collaboré à quatre de ses scénarios, dont ceux de Sous le sable et Swimming Pool qui ont permis au réalisateur d'atteindre la renommée.
Moins douloureux que le portrait qu'en a tiré Alain Cavalier dans son essentiel documentaire Être vivant et le savoir, cette fiction tourne autour d'enjeux forts, ne sachant pas toujours comment les développer en profondeur. Le sujet du suicide assisté a souvent été abordé au cinéma ces dernières années et Tout s'est bien passé peine à sortir du lot. Cela ne l'empêche pas de traiter avec sensibilité et tact une thématique universelle sans verser dans le mélo. Mieux encore, l'intégration de moments humoristiques - et ils sont nombreux - apporte une vitalité certaine, même si c'est au détriment du rythme.
Le cinéaste ne sait toutefois pas toujours comment mettre sa réalisation au service de son script qui n'épargne rien ni personne. Dans son excellent Grâce à Dieu, il abordait le scandale de prêtres pédophiles en proposant une mise en scène subtilement vertigineuse. Son travail apparaît ici beaucoup plus sage, académique et conventionnel, comme si sa difficulté à bien se positionner finissait par miner son inspiration.
Le brio de ses interprètes rachète largement ces errances formelles. Trop souvent abonné aux rôles secondaires de qualité très variable, André Dussollier rappelle qu'il est un immense acteur, jouant à la perfection ce dandy condamné. La prouesse est d'autant plus grande que le comédien ne peut que rarement utiliser son corps paralysé pour se faire valoir. Face à lui se dresse la merveilleuse Sophie Marceau, que l'on n'a pas vue aussi pétillante au cinéma au 21e siècle. Le reste de la distribution est exemplaire, alors que Géraldine Pailhas, Charlotte Rampling, Éric Caravaca, Grégory Gadebois et Hanna Schygulla s'investissent dans des rôles qui ne sont pas toujours évidents à défendre.
Sans être le grand film qu'il aurait pu être, Tout s'est bien passé demeure une oeuvre profondément humaine, bouleversante et amusante comme l'existence de tous les jours. Un cocon réconfortant idéal pour faire passer la grisaille passagère.