Un suspense qui repose uniquement sur le facteur chance, sur de banales probabilités, ne peut - rationnellement et cinématographiquement parlant - être pris au sérieux. La version originale française était généralement efficace, principalement en raison du rythme cohérent de l'histoire et de la crédibilité des personnages principaux. Les Américains ont choisi d'étirer le récit et d'insuffler au protagoniste une psychologie plus anxieuse et tourmentée. Les quarante-cinq minutes que l'on a ajoutées au scénario initial nuisent considérablement à la cohérence temporelle de l'oeuvre en plus de s'enfoncer dans des avenues inutiles et souvent absurdes.
Lara Brennan vit une existence paisible avec son mari et son jeune fils, Luke. Un jour, des policiers envahissent sa maison et l'accusent du meurtre de sa patronne avec laquelle elle avait certains différends. Son époux, John, est persuadé que sa femme est innocente. Il engage de nombreux avocats et tente lui-même de blanchir son nom en étudiant les preuves de la Couronne. Mais tout joue contre elle; ses empreintes sont sur l'arme du crime, elle était présente lors de l'assassinat et elle n'aimait pas sa supérieure. Voyant qu'il ne pourra la sauver grâce à la justice, il décide de l'aider à s'évader de prison.
Bien que Paul Haggis ait su, par le passé, nous transmettre sa vision différente du cinéma, nous prouver les innombrables possibilités d'un scénario - notamment grâce à son inimitable Crash -, il ne fait preuve, dans le cas présent, d'aucune individualité. The Next Three Days est un film d'action dans la plus pure tradition étasunienne : des coïncidences loufoques, des héros américains téméraires et déterminés ainsi que des scènes d'action improbables, mais visuellement percutantes. On tente vainement de nous faire croire qu'un professeur d'université peut accomplir des cascades périlleuses et braquer de sang-froid un vendeur de drogues, tout ça parce qu'il est mené par le désir de rendre la liberté à l'amour de sa vie. Le spectateur n'est pas dupe... Hollywood a parfois tendance à l'oublier.
Russell Crowe est d'une aberrante intensité, tellement que la crédibilité de son personnage en est affectée. Sa comparse à l'écran, Elizabeth Banks, manque également d'assiduité; on a de la difficulté à saisir les intentions fondamentales de son personnage. La narration aurait pu d'ailleurs se développer à partir sur cette ambiguïté (elle a-t-elle vraiment tué sa patronne, même si son mari est persuadé du contraire?), mais on finit par nous livrer bêtement la vérité, ne laissant aucune possibilité à l'interprétation et n'expliquant ainsi aucunement l'ambilavence de la prisonnière.
Avec The Next Three Days, on se retrouve avec un problème semblable à celui auquel nous étions confrontés lors de la sortie du long métrage Let me In, - inspiré d'une oeuvre suédoise - en octobre dernier. Pourquoi refaire un film, à peine un an après la sortie en salles de l'original, si c'est pour raconter exactement la même histoire? Les Américains (malgré les minutes supplémentaires) n'ont rien ajouté au récit pour lui permettre de s'élever au-delà de la simple prévisibilité. Ils ne semblent même pas avoir simplement tenté de rendre l'histoire différente des autres productions usinées qui déboulent chaque année dans nos cinémas. The Next Three Days n'est donc ni plus ni moins qu'une autre adaptation insipide et monotone au dénouement prévisible et aux assises décousues.
Un suspense qui repose uniquement sur le facteur chance, sur de banales probabilités, ne peut - rationnellement et cinématographiquement parlant - être pris au sérieux.
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