Il aura fallu de très longues années avant que la créatrice de Toupie et Binou, Dominique Jolin, voit son oeuvre portée au grand écran. L'adaptation de ce classique animé québécois a été si longue que les enfants qui regardaient l'émission à Télé-Québec sont désormais devenus de jeunes adultes. Iront-ils voir le film au cinéma en souvenir du bon vieux temps? C'est le souhait, évidemment. La production espère aussi convaincre de nouveaux petits adeptes à adhérer à l'univers fantaisiste de ces deux attachants meilleurs amis.
Toupie fait le souhait de faire disparaître une tache sur M. Mou, mais, comme la formulation de sa phrase laisse à désirer, il fait plutôt disparaître le toutou chéri de Binou. Déçu de son erreur, il promet de mettre tout en oeuvre pour le retrouver. Ainsi, accompagnés du génie qui leur a offert les souhaits, Toupie et Binou se dirigent vers le fabuleux « Monde des Objets Perdus », où devrait se trouver M. Mou. Sur leur chemin, ils feront la rencontre de personnages colorés, eux aussi à la recherche de quelque chose qu'ils ont malencontreusement égaré.
Même s'il n'a pas de grands enjeux dans cette histoire, on reste curieux de découvrir ce qui parsèmera la route de Toupie, Binou et leurs nouveaux amis. Qui est le fameux prince que cherche désespérément la princesse? Qui est le papa des jumeaux-goélands? Et à quoi ressemble « le grand chouchou » sont tant de questions auxquelles on devient impatient de connaître la réponse. L'humour en est un particulier - saugrenu, absurde - qui apporte beaucoup de personnalité à l'oeuvre québécoise.
Marc Labrèche fait un super travail dans la peau du fiévreux Toupie. Malgré tout, cette voix stridente finie par devenir agaçante après une heure vingt. Les nouveaux personnages, interprétés par une impressionnante distribution québécoise, parviennent à contre-balancer un peu l'énergie de la petite souris. Anne Dorval est particulièrement excellente sous les traits d'un génie obsédé par son téléphone.
Visiblement, on a voulu respecter l'esthétique des dessins animés du début des années 2000. Nous sommes loin de l'animation CGI à laquelle nous ont habitués les géants américains. Il y a quelque chose de rafraîchissant et de réconfortant dans ces illustrations naïves, mais nous sommes si conditionnés à l'animation par ordinateur que ces traits de crayon humains nous déstabilisent. Par contre, les enfants, eux, n'y verront que du feu.
Le principal problème avec Toupie et Binou, le film, c'est qu'il s'adresse à un auditoire préscolaire, une tranche d'âge qui n'a pas l'habitude de fréquenter les cinémas. Si le long métrage avait su parler simultanément à un public adulte, comme le font, par exemple, les films de Pixar, il aurait atteint son objectif de façon détournée. Mais Toupie et Binou parle aux enfants et uniquement aux enfants. Les parents n'ont pas grand-chose à se mettre sous la dent au sein des aventures rocambolesques de ce troupeau bigarré. Ainsi, l'intérêt d'amener leurs progénitures dans les salles sombres, ignorant même s'ils garderont l'intérêt pendant 1 h 20, est moins là.
Somme toute, Toupie et Binou, le film est charmant. L'ennui ici, on le répète, c'est le médium. Lorsqu'il sera disponible en vidéo sur demande, le long métrage fera fureur dans les salons. Mais, au cinéma, il n'y a rien de moins sûr...