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Àma Sol.
Voilà le film que le Mexique a envoyé cette année pour représenter le pays aux Oscars. Il n’a pas eu la chance d’être sélectionne et de concourir dans le quintet final pour la statuette du meilleur film étranger (contrairement aux excellents « La Zone d’intérêt » pour le Royaume-Uni ou « La salle des profs » pour l’Allemagne, mais comme « Anatomie d’une chute » qui se retrouvera, lui, dans d’autres catégories). En effet, « Totem » est certes moins mémorable et radical mais n’en demeure pas moins une belle proposition de cinéma. Sur une unité de temps (une fin de journée) et de lieu (une petite maison de banlieue), la cinéaste Lila Avilès tisse une belle histoire tiraillée aussi bien entre la lumière et l’obscurité que la vie et la mort. À travers les yeux d’une enfant, on va assister à la journée d’un microcosme familial chamboulé par la maladie mais qui célèbre le bouillonnement de la vie.
Sol est une petite fille qui va voir son père atteint d’une maladie grave. Ce dernier est en convalescence chez son grand-père dans la maison familiale où vivent ses tantes qui préparent l’anniversaire, forcément particulier, du malade. Rien ne nous est clairement expliqué dans les rapports qui unissent les membres de cette famille, il y a beaucoup de zones d’ombres laissées à l’appréciation du spectateur, mais on devine un divorce, un décès récent et surtout que cette fête d’anniversaire pourrait être la dernière pour le jeune papa malade. Durant une heure et demie on va assister à une multitude de petites séquences anodines de la vie de tous les jours qui font le quotidien de cette famille mexicaine marquée par la mort et la maladie. Et Avilès suggère plus qu’elle ne montre. Elle évite ainsi de sombrer dans un pathos excessif, préférant célébrer les derniers tumultes de la vie. La cinéaste nous expose les liens forts de cette famille par petites touches. Filmer la banalité de la vie pourrait sembler inintéressant (c’est parfois le cas d’ailleurs ici) mais elle le fait avec beaucoup de talent. Et, plus original, avec une dose d’exotisme propre à la culture mexicaine où le règne animal tient une place prépondérante et où le mysticisme a son mot à dire.
Si certaines séquences apparaissent anodines et manquent d’intérêt, elles font partie d’un tout cohérent, à la fois naturaliste et profond. La caméra est toujours au plus près des réactions et des émotions de ses personnages. « Totem » prend presque parfois la forme d’un documentaire sur le plan visuel faisant penser au récent et tout aussi mignon « Amà Gloria » qui croquait aussi la vie en toute simplicité avec les yeux de l’enfance. On ressent parfaitement la détresse et la tristesse des personnages se mêlant à la beauté et la sincérité des rapports humains qu’ils entretiennent. La distribution dans son ensemble est impeccable et nous immerge totalement dans cette atmosphère de liesse imbibée de désespoir. Certes, il n’y a pas vraiment d’histoire en tant que telle, mais cette accumulation de petites choses accouche d’une œuvre aussi tendre que tragique. Il manque un petit quelque chose pour que l’émotion nous gagne totalement et on a parfois la sensation d’un long-métrage incomplet mais « Totem » se distingue de l’anecdotique par son charme discret, son réalisme brut et sa sincérité. Les regards, les larmes et les mots des protagonistes du film nous hantent et nous heurtent dans ce film qui se voit comme un mausolée joyeux hanté par des fantômes convoquant la mort.
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