Comment réaliser une suite à Twister - assurément l'un des meilleurs films catastrophe à être sortis d'Hollywood - sans sombrer dans la redondance et la répétition?
Pas que les grands studios aient déjà vu un inconvénient à nous resservir la même recette à quelques ingrédients près, mais le défi était beaucoup plus apparent ici. Car la prémisse du film de Jan de Bont se voulait assez étroite, et laissait peu de place à l'ajout d'idées qui ne dénatureraient pas l'essence même de la proposition.
Les scénaristes Mark L. Smith et Joseph Kosinski et le réalisateur Lee Isaac Chung (le très beau Minari) se tirent d'abord d'affaire en privilégiant une approche moins cadencée et plus mélodramatique, puis en empruntant un tout autre chemin pour réintroduire les mêmes éléments dramatiques.
La séquence d'ouverture confronte la jeune Kate Carter (Daisy Edgar-Jones) au décès tragique de trois de ses amis au cours d'une expérience où elle avait la ferme conviction de pouvoir « arrêter » une tornade. Rien de moins.
Cinq ans plus tard, Kate est contactée par l'autre survivant de l'incident, Javi (Anthony Ramos), qui, depuis, a fait l'acquisition d'un équipement à la fine pointe de la technologie qui pourrait leur permettre d'en apprendre encore davantage sur ce phénomène météorologique ultra destructeur. Mais pour arriver à ses fins, Javi a d'abord et avant tout besoin de l'instinct incomparable de Kate.
Sur leur route, le duo et leur équipe de professionnels croisent Tyler Owens (Glen Powell), un créateur de contenu téméraire dont le grand plaisir dans la vie est de se diriger à toute allure avec son pickup vers le centre de toutes les tornades que lui et ses acolytes peuvent trouver. Rien de moins.
Tout comme l'opus de 1996, Twisters nous introduit à deux bandes de chasseurs de tornades que tout oppose, l'une ayant l'équipement et les investissements, l'autre s'organisant avec les moyens du bord et une passion difficilement comparable.
La grande différence, c'est que le personnage principal débute ici son parcours dans le camp qui était antagonisé par le premier film. Certes, dès son arrivée, Kate se fait courtiser par Tyler, dont elle condamne la nature des actions - ses frasques ayant d'autant plus tendance à attirer des touristes téméraires qui, si l'occasion se présentait, n'hésiteraient pas à prendre un selfie à proximité du pied d'éléphant à Tchernobyl. Évidemment, Kate découvrira peu à peu qu'elle a plus de points en commun avec Tyler qu'elle n'est prête à l'admettre.
Esthétiquement, le style poétique et maniéré de Lee Isaac Chung se manifeste dans sa façon de filmer la nature à l'oeuvre, dans son accalmie comme dans ses élans les plus ravageurs, nous rappelant à quel point nous sommes finalement très peu de choses face à celle-ci.
Mais la teneur plus émotionnelle du scénario rend également l'ensemble beaucoup plus prévisible, Smith et Kosinski se complaisant trop souvent dans les clichés les plus éculés pour faire progresser leurs personnages.
Ceci étant dit, Daisy Edgar-Jones apporte tout de même une belle sensibilité à son personnage cherchant à trouver un équilibre entre ses traumatismes passés et ses présentes ambitions, tandis que Glen Powell démontre une fois de plus qu'il est une source inépuisable de charisme.
Twisters se révèle aussi plus imposant que son prédécesseur en termes de panoramas à couper le souffle et de séquences de destruction - 28 années d'évolution en termes de technologies numériques ne sont pas étrangères à de tels résultats.
Surtout, Lee Isaac-Chung sait pertinemment que le spectateur n'en est pas à son premier rodéo, misant habilement sur les acquis du premier épisode pour contourner une certaine absence de surprises en plaçant le public dans une position beaucoup plus complice.
L'une des principales forces de Twister était justement ce désir de faire oeuvre utile, de tenter de comprendre la nature plutôt que de simplement la redouter et/ou la fuir.
Twisters exploite la même idée avec une tournure un peu plus réactive à l'Américaine qui fonctionne somme toute assez bien, et ce, même s'il n'arrive pas à reproduire le même esprit de groupe que son prédécesseur, qui comptait tout de même sur les talents de Bill Paxton, Helen Hunt et du regretté Philip Seymour Hoffman, pour ne nommer que ceux-ci. Le film s'éparpille en ce sens un peu trop aux quatre coins de sa trame dramatique pour nous permettre d'accorder le même intérêt aux personnages secondaires.
Mais au final, la réalisation aussi musclée que délicate de Lee Isaac Chung et la chimie dont font preuve les deux principaux interprètes compensent juste assez pour un scénario un peu trop rigide et mécanique.