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Le Backpak de l'enfer masculin.
Kitty Green retrouve l’extraordinaire Julia Garner (Ruth dans la géniale série « Ozark ») pour son second film et traite pratiquement du même sujet que son premier, LE sujet à la mode du moment : la masculinité toxique. Un thème passionnant et très large mais surexploité actuellement. Il peut d’ailleurs prendre bien des formes et des ramifications comme celle du pervers narcissique (« L’amour et les forêts »), celle du viol (« Promising Young Woman »), celle des petits gestes non désirés et/ou attouchements (« Scandale »), celle du mouvement MeToo (« She Said ») ou encore via une métaphore par le film de genre (le magistral « Men »). Une mouvance qui a explosé il y a une demi-douzaine d’années avec l’affaire Weinstein que Green avait justement pris comme sujet de son premier long-métrage. C’était le très rébarbatif et ennuyeux « L’Assistante » où, sans jamais citer l’illustre producteur, elle narrait le quotidien toxique d’une jeune assistante dans un bureau de production cinéma. Pourtant acclamé, ce film ne nous avait pas convaincu, contrairement à ce second essai qu’est « The Royal Hotel ».
Ici, quand bien même le sujet de fond est identique, le traitement est radicalement différent et bien plus percutant. Il avance en parallèle que ces comportements nocifs et toxiques ne sont pas l’apanage d’Hollywood puisqu’ici il y a changement d’angle, de décor et de situations. On se retrouve donc aux côtés de deux voyageuses canadiennes venues visiter et travailler en Australie avec un programme dédié. Elles vont se retrouver dans un bar au fin fond de l’outback australien où l’attitude de la gent masculine laisse à désirer et peut même devenir dangereux. Le long-métrage a le mérite d’être court mais d’aller à l’essentiel en faisant monter la tension crescendo et en se révélant complètement efficace. Un film d’une heure et trente minutes top chrono, c’est une gageure actuellement. Et quand le format est parfait pour ce que son auteur à en dire, qu’il n’y a pas de « gras » ni une seule seconde de trop ou d’ennui, c’est à saluer. « The Royal Hotel » pose vite son décor et ses enjeux et se conclut tout aussi rapidement (mais admirablement).
Les paysages de l’Australie profonde ajoutent un côté exotique mais également anxiogène. La faune humaine qui fréquente ce bar miteux est tout aussi variée que source de danger, l’alcool n’aidant pas. Et petit à petit, grâce surtout au personnage de Julia Garner, encore une fois exemplaire, on sent que quelque chose ne tourne pas rond dans cet endroit. Que les règles contemporaines ayant court au sein d’une société dite classique ou plus généralement en ville concernant les femmes ne s’appliquent pas forcément à cet endroit machiste semblant sortir d’un autre temps. Deux séquences nous mettent la pression et mal à l’aise (celle de la voiture et celle du couloir) et sont, en ce sens, particulièrement réussies. Les risques semblent de plus en plus prégnants à mesure que ces deux filles prennent conscience du danger et c’est dépeint de manière fine et juste, ce qui rend tout cela encore plus effrayant. Un suspense original qui pointe du doigt les manières masculines et la toxicité qui va avec dans les zones plus reculées avec brio tout en mettant le spectateur dans des situations peu aimables et à raison. « The Royal Hotel » est donc tout ce que « The Assistant » n’était pas : un film réussi et prenant.
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