Le septième art ne compte plus les films où un protagoniste recueille une jeune personne pour en faire une tueuse à gages. Il y a eu quelques références notoires comme Nikita et Kill Bill, des variations potables façon Hanna et The Villainess... ainsi que de nombreux échecs lamentables et déjà oubliés qui se nommaient Anna, The Long Kiss Goodbye ou Point of No Return selon l'époque de leur sortie. The Protégé appartiendra assurément à cette dernière catégorie.
Pourtant le premier plan du long métrage pique la curiosité. On se croirait chez Johnnie To avec cette utilisation atmosphérique de la pluie et de la couleur. Tout se gâche par la suite, alors que l'intrigue prévisible et télécommandée au possible se devine longtemps avant qu'elle arrive. Il est question d'un tueur à gages (Samuel L. Jackson) qui transmet son métier à une orpheline. En vieillissant, elle (Maggie Q) aura l'occasion d'en apprendre davantage sur son passé mystérieux. Surtout qu'une vengeance lui donnera les munitions nécessaires pour se transformer en un pendant féminin de John Wick.
Scénarisé par Richard Wenk à qui l'on doit des fresques aussi « mémorables » que The Mechanic, Jack Reacher: Never Go Back et les deux Equalizer, l'effort s'enlise dans les lieux communs, les dialogues sans queue ni tête et les revirements de situations à deux cennes. Cette production sans attrait aurait pu voir le jour à la fin des années 90 ou au début des années 2000 et le spectateur n'y aurait vu que du feu.
C'est sans doute pour cette raison que le cinéaste Martin Campbell a été embauché. Son travail le plus conséquent provient de cette période (deux James Bond et deux Zorro), avant que le misérable Green Lantern bousille complètement sa carrière. Depuis ce temps, il y a eu le plus ou moins convaincant The Foreigner où Jackie Chan se mesurait à Pierce Brosnan, et maintenant The Protégé qui est loin de remettre les compteurs à zéro. Sa réalisation purement fonctionnelle multiplie les plans sans style ni conviction. Le montage doté d'ellipses involontairement hilarantes est laborieux, le rythme instable et l'ennui ne tarde pas à émaner. Le tout est heureusement secoué par une utilisation intéressante des paysages vietnamiens et les séquences d'action, rudimentaires et guère originales quoique rondement menées.
La plus grande erreur du projet est d'avoir confié le rôle principal à Maggie Q. L'actrice associée à une variation télévisuelle de Nikita (la version originale de Luc Besson demeure une inspiration importante du récit) manque singulièrement de charisme, même lorsqu'elle se vêtit de cuir pour affronter les méchants. Déjà qu'elle sourit lorsque le malheur l'afflige... Cela ne va guère mieux lorsqu'elle se met en mode comique ou romantique. Seul le registre mélancolique lui va comme un gant, ce qui arrive dans les trois dernières minutes avant l'intrigante conclusion (le film aurait d'ailleurs dû débuter là où il se termine).
Elle est censée former un duo de choc - attirance et répulsion - avec Michael Keaton. Déjà, il faudra repasser pour la chimie, inexistante. Et ce n'est pas seulement une question de différence d'âge. Surtout que l'ancien Batman a tendance à en faire trop lorsqu'il est mal ou pas dirigé, comme c'est le cas ici. De son côté, Samuel L. Jackson s'en sort un peu mieux, même si c'est un personnage qu'il connaît comme sa poche.
Sentant la routine à plein nez, The Protégé n'est pas nécessairement à classer dans la catégorie du navet tellement indigeste qui donne envie de sortir de la salle de cinéma. Il y a un certain niveau de compétence technique permettant aux amateurs de série B d'en soutirer un plaisir très, très relatif. C'est seulement que l'ensemble, générique au possible, semble avoir été assemblé à la va-vite dans une usine à saucisses. Il n'y a aucune valeur nutritive à cette entité prémâchée qui possède le même goût que les 100 précédentes propositions issues du même moule. Pas surprenant alors de vouloir changer de recette afin de se mettre quelque chose de potable sous la dent.