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Sacré boys band.
Ryan Murphy est décidément partout sur Netflix. Le voilà qui s’attache à produire une adaptation cinématographique d’une illustre pièce de théâtre de Matt Crowley qui a fait vibrer les planches de nombreuses scènes à travers le monde, notamment à Broadway. Très avant-gardiste et osée pour l’époque, elle mettait en scène une dizaine d’amis gays bavardant le temps d’une soirée. Considérations amoureuses, politiques ou sociales étaient à l’ordre du jour à une époque où la libération sexuelle n’avait pas eu lieu et où les mœurs étaient bien plus strictes en termes de préférence sexuelle. L’intérêt de refaire la pièce en film (après une première adaptation de la part de William Friedkin il y a cinquante ans) semblait intéressante pour voir l’évolution en cinquante ans, donc de l’actualiser. Mais « The Boys in the band » se déroule pourtant toujours en 1968 et le propos n’a pas été modernisé. Plutôt que de transposer l’histoire à notre époque, c’est en comparant par nous-mêmes que l’on voit les changements opérés dans la société. Et c’est dans les nuances que l’on perçoit qu’au final certaines choses restent inchangées voire terriblement d’actualité. Quitte cependant et en effet à s’interroger sur l’utilité de cette nouvelle mouture.
Mais soyons clairs : ce film risque de plaire davantage à la communauté gay et ses sympathisants qu’aux autres. Pas que le film soit sectaire mais à l’instar de la pièce il parle de problèmes de gays avant de parler de choses universelles. Sans être une œuvre communautaire, c’est une œuvre de niche qui aura plus de retentissements auprès des personnes concernées. Si l’on se met cela en tête, on ne peut qu’apprécier le reste. D’abord, le réalisateur (également acteur) Joe Mantello s’affranchit de la base théâtrale de « The Boys in the band » pour faire voler sa caméra à travers les pièces de l’appartement et nous gratifier d’une photographie de toute beauté. De plus, il multiplie les champs-contrechamps et les changements de cadres pour dynamiser sa mise en scène et rendre le film moins statique. Certains films adaptés de pièces de théâtre ne s’encombrent pas d’autant d’efforts pour se départir d’un format théâtral et s’avèrent réussis tout de même (« Le Dîner de cons » ou « Le Père Noël est une ordure » en sont les parfaits exemples) mais de vouloir s’en détacher est une bonne chose et une chose réussie ici. Si la première demi-heure est un peu bavarde et longuette, dès lors que tous les protagonistes sont en jeu et que le jeu de massacre commence, c’est un véritable bijou mariant humour, émotion et profondeur psychologique. Et il ne faut pas oublier les prestations hautes en couleurs de Jim Parsons et surtout Zachary Quinto, totalement déchaînées et jubilatoires, assorties de dialogues en or massif.
En effet, ces derniers sont à ce titre de véritables pépites. Les joutes verbales entre les personnages alternent sarcasmes, ironie et humour noir et elles fusent en ne nous laissant aucun répit. Rires et émotion se mélangent, parfois en l’espace d’une même scène, dans un dosage parfait. Quant aux personnages, qui semblent de prime abord des stéréotypes, le scénario les amène presque tous à évoluer et se complexifier pour finalement rendre ces clichés bien plus insaisissables et profonds que prévu. On rit beaucoup lorsque ces messieurs sortent les crocs à coup de vacheries bien envoyées mais on s’émeut aussi beaucoup de la solitude et de la tristesse qu’ils ressentent au fond d’eux. « The Boys in the band » est certes très verbeux et bavard (logique en même temps), cependant ce qui passerait au début pour des futilités superficielles se densifie petit à petit et nous captive. Il y a même une certaine mélancolie qui s’empare de nous lorsque le rideau se ferme, triste d’avoir abandonné cette bande de garçons en se disant que certaines choses n’ont malheureusement guère changées. En tout état de cause, un huis-clos à la fois comique et dramatique délicieux et maîtrisé, mais surtout bien plus profond qu’il n’y parait.
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