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Critique Tête de Turc
Quelle belle surprise nous fait Pascal Elbé qui d’habitude est devant les caméras, il fait partie des visages familiers du cinéma populaire qu’on apprécie de revoir au détour de films à base comique mais on n’oublie aussi parfois que Pascal Elbé est aussi scénariste, il a ainsi participé à la rédaction du film de Roschdy Zem (Mauvaise foi) ou encore celui de Boujenah (Père et fils) mais pour passer derrière la caméra, le jeune réalisateur prend un fait divers comme base scénaristique, on le retrouve à la réalisation d’un thriller dont on n’aurait jamais pu estimer cela d’un acteur du à l’image qu’il a donné durant quelques années, sachant que ce genre de film est quelques peu délaissé par nos réalisateurs mais aussi par le public de plus en plus difficile, alors que le thriller et le polar connu de beaux jours durant les années 80, mais il existe encore quelques réalisateurs qui luttent toujours pour pouvoir continuer à réaliser des polars talentueux qui continuent d’œuvrer dans ce sens, comme Schonderffer ou encore Boukhrief pour ne citer qu’eux. Maintenant, il faudra rajouter à cette liste Pascal Elbé qui signe ici un excellent film à la croisée des genres, entre film choral, chronique social et polar, il part ici d’ fait divers: agression d’un médecin pour montrer, sans caricature le fossé qu’il existe entre le pouvoirs publics et les cités, il y montre aussi l’atmosphère des cités au quotidien qui se révèlent être difficile à vivre, on regrette juste que le film voit durant le cours de l’histoire son discours et ses intentions détournés par des thèmes comme la vengeance ou encore le pardon. La première partie du film qui se concentre à décrire les conséquences qu’apportent l’acte isolé sur la vie de la cité, en effet l’acte est monté en épingle dans les médias, l’attention politique est à son comble, multiplication des contrôles d’identité… bref que des pressions de l’extérieur qui apportent forcément son lot de réponses dans la cité, comme la loi du silence, agression sur Bora. Le film montre donc une narration qui oppose le harcèlement que subissent malgré eux la population mais aussi le sentiment d’injustice et la crainte de représailles et entre tout cela, on retrouve une mère qui essaye malgré tout de continuer à garder un équilibre dans son foyer. Pascal Elbé montre alors par le biais de Bora qui est à la fois l’agresseur et le sauveur que le postulat de départ établit par l’auteur et qui l’a ainsi poussé à faire ce film: rendre compte de la complexité dans laquelle les cités se retrouvent: les banlieues étant à la fois une terre de diversité culturelle mais aussi le berceau des persécutions des classes. Bora se retrouve face à un dilemme dont il n’arrive à trouver réponse: doit-il se dénoncer afin de faire innocenter le frère de la voisine ou doit-il accepter la médaille pour avoir sauvé le médecin, montrant par la même occasion le décalage entre la réalité et les images que l’on peut apercevoir à la télévision, en vue du résultat le pari de Elbé est donc réussit apportant une finesse nécessaire pour relancer le débat sur les cités, mais malheureusement le film sombre petit à petit dans un genre différents où les enjeux apparaissent, on avait déjà quelques éléments précurseurs dans la première partie avec les apparitions de l’excellent Simon Abkarian dont malheureusement ces scènes ne semblent pas vouloir s’incorporer proprement dans le film, le réalisateur n’arrivant pas à lancer ses scènes lui ce qui lui auraient permis de présenter de la meilleur façon qu’il soit le changement de rythme dans la second moitié, ainsi la fin du film semble tomber comme une crêpe raté tant on n’attend plus que de savoir qui des personnages va mourir le premier ou se faire incarcérer. Il faut tout de même reconnaitre le risque pris par le réalisateur de traité des problèmes de banlieues et la meilleure idée n’est en effet pas de le faire par le biais d’un drame social, c’est pourquoi Elbé prend le risque de traiter son sujet en utilisant les codes du polar, cette technique est à double tranchant, le film de genre peut reléguer au second plan le message que l’on souhaite faire passer, le spectacle occupant toute la place et c’est ici que Elbé loupe de peu un beau film, il s’en sort tout de même avec les honneurs se distançant des films de Marchal plutôt lyrique mais collant plus à des films comme Narc de Joe Carnahan ou encore les films de James Gray. Le réalisateur réussit à éviter tous les pièges que l’ensemble des films traitant des cités tombent dans le panneau à chaque fois, il ne propose pas de clichés, d’empathie, pas d’excuses bidons… le film soulève des questions sans jamais vraiment cherché à trouver des solutions, il live un joli combat de certaines personnes vivant dans ces cités, qui cherchent à sortir de ce ghetto, d’une jeune prenant conscience de ces actes…
Elbé qui rappelons le réalise ici son premier film, emballe le tout avec une mise en scène nerveuse avec caméra à l’épaule, et dès les premières scènes on est saisit par la violence qu’il veut on ne peut plus efficace aidé par une photographie magnifique et une musique de Bruno Coulais (qui au passage est aussi compositeur de films comme Agathe Clery…) les fonds sonores aidant à suivre le point de vue de Bora, interprété au passage par Samir Makhlouf qui donne ici une interprétation tout en retenue et de la profondeur dans son regard porte le film un peu comme un Tahar Rahim. A noter que le réalisateur s’est bien documenté avant de filmer cette version, notamment au patron de la brigade criminelle afin d’éviter les erreurs.