Telle mère, telle fille n'est pas le pendant féminin de Tel père, tel fils d'Hirozaku Kore-eda, cet excellent opus japonais qui faisait rire et pleurer. Il s'agit plutôt d'un film très français dans son approche, dont le charme initial se réduit comme peau de chagrin.
L'idée de voir une trentenaire (Camille Cottin) et sa propre mère (Juliette Binoche) plus adolescente qu'elle être enceinte en même temps (heureusement de deux pères différents) avait tout un potentiel. Une réflexion sur la filiation qui est doublée d'un regard sur la difficulté d'être femme (la peur de mal vieillir, la nécessité de prendre sa place et de passer à l'âge adulte, etc.) pouvait donc se tenir. Il n'y a malheureusement rien de tout cela ici, alors que la production s'apparente à une variation éculée de Father of the Bride II.
Ce qui se voulait profond n'est que superficiel et aucun des thèmes abordés n'est réellement incarné. Dès que l'émotion apparaît à l'horizon, tout s'avère faux, plaqué. À l'image de la mise en scène de la réalisatrice et coscénariste Noémie Saglio qui ne propose rien de plus qu'un téléfilm déguisé. Les différents mois de grossesse qui défilent à l'écran seront longs et exaspérants pour les héroïnes, leur entourage et les spectateurs aussi. Largement imparfait, un des précédents longs métrages de la cinéaste, Toute première fois, était beaucoup plus senti. La musique légère et inspirée de Mathieu Chédid (alias -M-) ne change rien.
Le récit ne fonctionne pas davantage si on se concentre uniquement sur l'humour. Les gags faciles, inégaux et peu rigolos ratissent larges, lorgnant vers la comédie de remariage (avec clins d'oeil aux classiques américains des années 30) et les duos mal assortis. Les engueulades sont omniprésentes et on s'entête trop souvent sur les calembours de type premier degré, avec un chien qui a la libido dans le tapis et une horde de personnages unidimensionnels qui reviennent faire leur petit numéro toutes les 20 minutes. On pouvait pardonner ces défauts à un Snatched qui délirait dans l'absurde, mais Telle mère, telle fille est rarement drôle, exaspérant dans sa surutilisation d'effets.
Cette sensation de trop en offrir afflige le jeu de tous les comédiens, même les principaux. L'hystérique Camille Cottin en fait des tonnes et elle était nettement plus supportable dans Cigarettes et chocolat chaud. Pour une rare fois que Juliette Binoche trouve un rôle humoristique, il fallait la diriger le moindrement. Autant l'actrice possède ce rythme unique dans le sang (la disjonctée Ma loute de Bruno Dumont qui n'a toujours pas pris l'affiche au Québec en est la preuve vivante), autant elle a besoin d'un minimum d'encadrement. Ce qui n'est pas le cas, rendant son jeu excessif, à la limite du supportable. Ses retrouvailles avec Lambert Wilson, 32 ans après le marquant Rendez-vous d'André Téchiné, donnent les meilleurs moments de l'ouvrage. Le duo est exquis et l'interprète à la classe légendaire laisse agir son charisme unique, même si plusieurs situations forcées ne sont pas à son avantage. Pour la crédibilité, il faudra repasser.
Poussif, banal et convenu, Telle mère, telle fille n'est pas à la hauteur de son casting et de sa prometteuse idée de départ. Le minimum requis du simple divertissement léger et oubliable n'est même pas atteint. Ce n'est pas avec ce film que l'on redorera le blason du cinéma français au Québec.